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Les Pieds-noirs à la mer (Fred NEIDHARDT)

note: 3... Laëtitia - 18 mars 2014

Le titre de ce roman graphique annonce la couleur : «Les Pieds-noirs à la mer!» est le délicat slogan qui fleurissait sur certaines banderoles de la CGT sur le port de Marseille en 1962, pendant que son maire, Gaston Deferre, se fendait d’un «qu’ils aillent se faire pendre ailleurs». Lâchés par De Gaulle, forcés à un exil humiliant, certains Pieds-Noirs développent une certaine aigreur. C’est le cas des grands-parents de Daniel qui ne sont pas à un paradoxe près : le grand-père, antisémite en paroles, a épousé une Juive de Constantine qui elle, médit sur les Arabes, mais a pour amie Madame Benjeloun et parle arabe comme elle respire. Daniel, 19 ans, vient trouver refuge chez ses grands-parents à Marseille suite à une fugue.Voulant faire table rase du passé et essayer de réconcilier les communautés, il tentera de résoudre un psychodrame familial : son cousin Stéphane est sur le point d’épouser Khadija, kabyle, et pour cela est renié par sa famille (ce qui nous vaut la savoureuse imprécation de la grand-mère «Que le cul lui tombe dans un panier d’oursins»). Tout le monde en prend pour son grade, il n’y a pas les bons d’un côté, les méchants de l’autre. Du point de vue formel, on notera la prédominance d’un séquençage clair à l’aide de couleurs dominantes différentes selon les époques et les lieux, et le choix de personnages à têtes d’animaux pour dire la part d’animalité qu’il y a en chacun de nous.

Mystères sur la toile (Erica LAFFON)

note: 3...Anonyme - 4 mars 2014

Connaissez-vous le « Coucher de soleil sur l’Adriatique », étonnant tableau de 1910 ? Ce livre vous propose les coulisses de cette mémorable "ânerie" concoctée par Roland Dorgelès et ses joyeux camarades du Lapin agile au cœur de Montmartre. Vous revivrez aussi le vol de la Joconde en plein Louvres en 1912. Si toute la police de Paris en perdit le sourire, ce ne fut pas le cas de la presse que cette étrange disparition rendit hilare ! Certains chapitres tout aussi anecdotiques mais plus graves, abordent le sujet des pillages d’œuvres d’art pendant les guerres. De Napoléon à Hitler, tableaux et sculptures ont emprunté d’étonnants circuits pour échapper à l’occupant. Hommage est rendu aux conservateurs et employés de musées, ayant déployé des trésors d’imagination pour sauver le patrimoine. Il est aussi question de marché d’art où se croisent voleurs, antiquaires, faussaires de génie, critiques, créant autant d’histoires grotesques, drôles ou pitoyables. De petites histoires de l’art à lire presque comme un roman d’aventure.

Les Lois de la frontière (Javier CERCAS)

note: 4... Laëtitia - 4 mars 2014

«Les Lois de la frontière» de Javier Cercas est une pépite de plus extraite de la veine de la littérature espagnole, à la fois épopée d’un bandit légendaire, Zarco, radiographie d’une jeunesse post-franquiste sacrifiée, mais avant tout un magnifique roman d’apprentissage. Eté 1978, Gérone, Catalogne, pour fuir les brimades d’un camarade de lycée, le cruel Batista, Ignacio Cañas, fait un détour par ce que l’on nomme «la frontière», c'est-à-dire passe du côté des quartiers mal famés de la vieille ville. Paradoxalement, alors que cet adolescent des classes moyennes n’avait pas su trouver protection et compréhension auprès de sa famille, il trouve tout cela auprès de Zarco et de sa bande, délinquants affranchis. Le temps d’un été, il goûte à l’ivresse des vols de voitures, nuits de débauche, puis rentrera dans le droit chemin en devenant avocat pénaliste. Des années plus tard, un jeune écrivain est chargé d’écrire la biographie de Zarco, avec le regard croisé et forcément différent des protagonistes : Cañas, le policier qui a procédé à l’arrestation de Zarco et le directeur de la prison. Très beau livre sur l’influence des origines sociales, la part du destin, la fragilité de l’adolescence.

Michael Kohlhaas (Arnaud DES PALLIERES)

note: 3...Anonyme - 21 février 2014

Michael Kohlhaas ou l'injustice sociale. Au 16e s dans les Cévennes, un riche marchand de chevaux protestant, lève une petite armée semant la terreur sur les domaines des nobles pour faire entendre sa requête : Faire comparaître à nouveau, un baron «relaxé » grâce à l’intervention d’un membre de sa famille proche de la cour de la princesse d’Angoulême. Le jeune baron et sa suite lui ont volé 2 chevaux, ont blessé son valet, puis ont battu sa femme à mort…Rien de moins. L’ampleur des crimes et de l’impunité des nantis rend l’empathie à la cause de Kolhaas immédiate. Toutefois, comme chaque histoire de vengeance, elle questionne la légitimité de se faire justice soi-même. Déjà, le crescendo des punitions menant à la mort de son épouse, interroge sur la vertu de la persévérance : fallait-il ou pas renoncer plus tôt ? Folie (la princesse catholique le qualifie de fanatique), orgueil (jugement théologique du pasteur) ? Ou la justice, idéal jamais atteint, exige-t-elle un sacrifice ? Un film à l'esthétique austère, porté par les larges épaules de Mads Mikkelsen et rythmé de longues chevauchées dans les paysages arides. Adapté du roman d'Heinrich von Kleist, contemporain de Goethe, le film rend au moins justice à l'œuvre originale du "poète maudit" allemand.

La Colère de Fantômas n° 2
Tout l'or de Paris (Olivier BOCQUET)

note: 4...Anonyme - 20 février 2014

Olivier Bocquet, confirme son talent pour jouer avec nos nerfs dans ce 2e volet de la trilogie Fantomas (Prix Interpol'art 2013). Pas d'affaiblissement dans l'action et toujours pas question d'arrondir les angles. Non, Fantômas n'est pas un personnage consensuel. Non, on ne nous servira pas de beaux sentiments cachés sous la défense des causes perdues. Non, on ne nous laissera pas entrevoir de faille. Ce qui est étonnant et fin dans ce scenario, c'est de ne pas mettre le lecteur dans une situation franche ni d'empathie ni de rejet, envers aucun des représentants des 2 pôles justice/hors-la-loi. On se surprend à vouloir que la quête de chacun aboutisse, bien-sûr c'est antinomique (et pas bien du tout, parce que Fantômas quand-même, qu'elle monstre fait-il ! sans remord, sans compassion…). Certainement tout l'intérêt de la littérature, non pas donner du manichéisme "pré-maché-digéré" mais bien servir des émotions troublantes, qui cheminent différemment chez chacun. Le dessin toujours aussi soigné, suit la descente aux enfers par des couleurs glauques tandis qu'il était rehaussé de tons chauds dans le 1er album. Doublement sous les feux de l'actualité BD en ce début d'année, le scénariste a signé l'adaptation de "La Princesse des glaces" (Actes sud 2008) de la reine du polar, Camilla Läckberg, disponible à la médiathèque.

Wunderkind (Nikolai GROZNI)

note: 4...Anonyme - 12 février 2014

Si l’adolescence est par nature contestataire et un artiste par essence à fleur de peau, imaginez le récit de ce jeune homme de 15 ans, élève pianiste au conservatoire pour enfants prodiges de Sofia en 1988 : Explosif ! Le régime totalitaire malmène sa jeunesse qui le lui rend bien et l’échange de coups prend des tournures de tragédie grecque. Konstantin, est l’un de ceux qui refuse de se soumettre au système, sa singularité, que certains prennent pour de l’orgueil, palpite trop pour être étouffée sous les discours dogmatiques. Sa rage de réussite pour se libérer peut aussi bien se retourner contre lui dans un processus d’autodestruction, sans cesse entre combat et abandon. Un roman magnétique porté par la voix exaltée de la jeunesse. Comment survivent l’art et l’amour sous la dictature ? La force de ce livre repose également bien-entendu, sur l’univers musical de l’œuvre dont on retrouve l’emprunte partout, du rythme au vocabulaire, confirmant la particularité des « romans de musiciens ». Une même sensation enveloppante saisit à la lecture de « Sauvez Mozart » de Jérusalmy ou « une mesure de trop » de Sulzer. Nikolai Grozni, jeune auteur bulgare, a lui-même commencé le piano à 4 ans, wunderkind quelques années avant l’éclatement du bloc soviétique…

La Fabrique du monde (Sophie VAN DER LINDEN)

note: 3... Laëtitia - 4 février 2014

«Comme chaque fois, je ne peux m’empêcher d’imaginer l’étranger qui portera la pièce que je suis en train de commencer. Cette chemise-là sera portée par un homme qui aime les jeans et qui fait de la moto. […] Si ça continue, je vais faire comme Yuan qui, un jour, a glissé en douce un mot dans la poche d’un pantalon pour hommes, en pensant que le Prince charmant qui le porterait trouverait le message et hop, sauterait dans le premier avion pour venir la sauver? Est-ce qu’il leur arrive de penser à nous?». Cette réflexion de Mei, héroïne principale du roman, pose le décor. Nous sommes dans une immense usine de textile, quelque part en Chine, et c’est le quotidien de ces petites mains qui nous est conté, avec ses cadences infernales (à tel point qu’une d’entre elles aura un tendon sectionné), son contremaître qui les harcèle pour un meilleur rendement. Malgré tout, elles rêvent comme leurs consoeurs occidentales : d’une belle robe, de l’amour. A la faveur du Nouvel An chinois qui la laisse seule à l’usine avec Cheng, le nouveau contremaître, Mei va s’éveiller à l’amour. Avant de déchanter. Très beau premier roman, qui nous poursuit longtemps après et nous interroge : sommes-nous prêt à accepter cela pour céder à la mode à bas coût?

Medianeras (Gustavo TARETTO)

note: 3... Laëtitia - 4 février 2014

Medianeras est un premier film argentin, dont Buenos Aires est un protagoniste à part entière. En effet, dès le générique d’ouverture et son étude sociologique des médianeras, synonyme de «murs aveugles» truffés de fenêtres insolites, de publicités clinquantes, le spectateur est plongé dans une mégapole effervescente à l’architecture bigarrée, soumise à de stricts codes sociaux. Cette chronique urbaine se double d’une comédie sentimentale, car le but du jeu est de déjouer les lois de la probabilité qui font que deux personnes vivant dans une mégapole de 3 millions d’âmes ont peu de chance de se rencontrer. Nous assistons donc au chassé-croisé amoureux de deux solitudes, celles de Mariana et Martin, jusqu’à la rencontre tant attendue. Bien qu’étant une comédie romantique, le film s’éloigne de la mièvrerie inhérente aux stéréotypes de jeunes gens en proie au doute existentiel. A découvrir.

Un Monde beau, fou et cruel (Troy BLACKLAWS)

note: 4Au pays de Mandela Laëtitia - 22 janvier 2014

Nous sommes dans l’Afrique du Sud de l’après-apartheid, mais le rêve d’une nation arc-en-ciel n’est qu’un mirage. L’histoire se déroule sur un mois au Cap,où sévissent une extrême pauvreté,des trafics en tous genres et le racisme inter-ethnique.Nous suivons les tribulations de Jéro et de Jabulani, qui symbolisent tous deux cette nouvelle Afrique du Sud. Jéro est un «coloured», Jabulani un étranger fuyant le Zimbabwe. L'un renonce à ses études pour vendre des souvenirs de pacotille aux touristes, l'autre tombe aux mains de malfrats qui le font travailler comme esclave dans une plantation de marijuana, avant de parvenir à s’en échapper. Et c’est là que leurs destins se croisent : Jabulani sauve la vie d’un homme qui n’est autre que Zéro Cupido, le père de Jéro, sorte de caïd à la Tarantino, mais un caïd au grand cœur qui aide les plus démunis. Car ce qui fait la force du livre et l’éclaire d’une note d’espoir, ce sont les rencontres bienveillantes qui permettent aux hommes de ne pas sombrer, telle la femme qui, au péril de sa vie, prend Jabulani en stop alors qu’il est pourchassé par le «cow-boy fantôme». Enfin, autre point qui fait la force de ce livre, c’est la peinture minutieuse des territoires, avec ses paysages et son climat qui font toute la beauté de la province du Cap : l’océan, ses pêcheurs et ses requins, les fynbos et les frangipaniers, le grouillement du marché du Cap.Un livre envoûtant et abouti.

Mud (Jeff NICHOLS)

note: 3...Anonyme - 18 janvier 2014

Sur une île du fleuve Mississipi, deux adolescents découvrent un bateau perché dans un arbre, planque d’un homme en cavale. Le rythme paisible porté par le large fleuve, s’étire sur plus de 2h de film, mais ne laisse jamais l’esprit en paix, le danger rôdant comme la brume. Deux éléments rappellent les précédents films du réalisateur : la tension et la nature sauvage. Après les relations fraternelles dans Shotgun story et l’obsession apocalyptique de Take shelter (superbe), Jeff Nichols s’intéresse au romantisme de l’adolescence. Vous pouvez avoir lu de nombreux récits initiatiques que celui-ci ne vous décevra pas. Preuve que l’art peut toujours se renouveler, peu importe que le sujet ne soit pas inédit. Inspiré par les personnages de Mark Twain, Nichols propose une vision touchante de la quête d’absolu d’un Tom Sawyer et de son inséparable Huckleberry Finn. Un film à la poésie troublante mais pas torturée, finalement plus optimiste qu’on aurait pu le croire aux premiers coups de rames.

En même temps, toute la terre et tout le ciel (Ruth OZEKI)

note: 3...Anonyme - 16 janvier 2014

Présenté comme un inovel (roman « naturaliste » à caractère autobiographique contenant des références littéraires, oui tout ça et d’autres choses encore !) genre répandu au Japon, ce livre de l’auteur américano japonaise, devenue moine bouddhiste, est un objet littéraire déroutant. Des éléments de sa propre histoire de romancière nord américaine retirée du monde, se croisent avec ceux de la vie tragique d’une adolescente japonaise, dont elle recueille le journal intime échoué sur les côtes de Nouvelle Colombie (Canada) après le tsunami. Une relation dépassant l’espace et le temps se noue au fil de la lecture du journal jusqu’à changer le cours de leur vie. Il y a beaucoup de choses dans ce roman : un manuel de philosophie zen, une ode à la nature sacrifiée, une critique de la violence des sociétés tant américaine que japonaise, voyez, la liste est longue, en même temps, c’était annoncé dans le titre ! Mais au-delà de tout, l'écrivain-moine insuffle de l’espoir et communique son aspiration à la paix.

Une Lampe entre les dents (Christos CHRYSSOPOULOS)

note: 3...Anonyme - 8 janvier 2014

Une lampe torche entre les dents, un chiffonnier fouille une benne à ordures un soir de décembre 2011 à Athènes. Image de misère visible dans toutes les villes du monde, mais ce compte-rendu des flâneries quotidiennes de l’auteur dans sa ville n’est pas une chronique de la rue ordinaire. Il s’agit bien des effets violents de la crise - qu’il ne nommera que dans les dernières pages- subie depuis 2 ans par la Grèce. Les marginaux sont rejoints par les familles et les travailleurs les plus fragiles sur le trottoir. Quelque chose a changé et la contribution de l’écrivain « consiste à signaler ce qu’il soupçonne des mutations en cours ». Une chronique athénienne angoissante malgrè la distance pudique. Christos Chryssopoulos, romancier et membre du Parlement culturel européen, confirme sa fascination pour la relation homme/ville déjà disséquée dans sa fiction « La Destruction du Parthénon ».

Nocturnes (Cécile WAJSBROT)

note: 3... Laëtitia - 2 janvier 2014

Si vous avez aimé frissonner au coin du feu en écoutant les histoires effrayantes narrées par la voix grave de Pierre Bellemare, vous aimerez sans doute «Nocturnes» de l’irlandais Connolly. «La balade du cow-boy cancéreux» ou l’histoire d’un homme infecté par un mal en mutation, ouvre le bal de ce recueil de nouvelles fantastiques. Elles ont un dénominateur commun : leur histoire est ancrée avant la seconde guerre mondiale (hormis une exception). Toutes jouent sur l’exploitation de cette «peur rampante», irrationnelle, entretenue par maintes légendes. Tous les registres du paranormal et les classiques du fantastique sont ici repris : mythe du Golem («Le démon de M. Pettinger»), loup garou («Le cycle»), rituels sataniques («Sables mouvants»), vampire («Le bel engrais de miss Froom»), revenant («Le lit nuptial»), etc. Des nouvelles qui vous hanteront longtemps.

La Mémoire du monde n° 1 (Stéphanie JANICOT)

note: 3... Laëtitia - 31 décembre 2013

Ce premier volet d’une trilogie à venir est un roman historique au souffle romanesque qui, en dépit de ses 500 pages, se dévore d’une traite. C’est l’histoire de Mérit, jeune égyptienne dont le grand-père est guérisseur du pharaon Aménophis III. Ce dernier rêve d’éternité et lui demande de lui concocter un philtre d’immortalité. Finalement, ce sera Mérit qui le boira... Fuyant Ramsès II, elle suit les hébreux dans leur exode, s’arrêtant en Canaan, et nous contera telle Shéhérazade sa propre version des faits. Elle choisira toujours des femmes dans sa descendance pour transmettre son savoir et les histoires qui façonnèrent les grandes civilisations. Car Mérit traverse les siècles et nous permet de mieux comprendre les origines des grandes civilisations –égyptienne, assyrienne, perse, grecque-, incarnant à elle seule l’histoire du Proche Orient et de la Méditerranée. Elle croisera le chemin des plus grands penseurs, philosophes, prophètes et rois, tels Socrate, Platon, Empédocle, Alexandre, Ptolémée Philadelphe, etc. En somme, une merveilleuse machine à remonter le temps !

Les Anges de Millesgarden (Alexandre NAJJAR)

note: 3...Anonyme - 14 décembre 2013

Une collection à découvrir :Le sentiment géographique. Entre récit et guide de voyages, une formule intime pour pénétrer un pays par l’œil d’un auteur. Ici, Alexandre Najjar, auteur du roman Phenicia (prix Méditerranée) rapporte ses impressions de Stockholm et Göteborg.Sans index «à voir» «à faire», on y trouve néanmoins des descriptions de lieux incontournables et une bonne dose d’anecdotes historiques truculentes (connaissez-vous l’incroyable vie de Jean-Baptiste Bernadotte?). Il présente surtout ses rencontres avec les suédois mais aussi les français et moyen-orientaux installés dans le pays. Chauffeurs de taxi, jardinier,enseignants, donnent quelques clés pour comprendre l’état d’esprit en contraste avec le méditerranéen que l’auteur libanais représente.Bien-entendu, on ne peut échapper à l’antinomie entre flamboyance chaotique arabo-latine/ efficace pondération scandinave. S'il exprime son admiration pour ce pays enivrant de beauté et son peuple paisible, il ne cache pas les failles du fameux «modèle suédois»: Effritement des acquis sociaux,malaise sur la question de l’accueil des réfugiés, «américanisation» culturelle (au détriment entre autres, d’une culture francophone/phile fortement ancrée autrefois). La forme un peu fourre-tout alternant des chapitres visites, suédois célèbres, rencontres etc… loin d’être désagréable, permet de changer de rythme et de concentration dans la lecture.

Une Mesure de trop (Alain Claude SULZER)

note: 3...Anonyme - 26 novembre 2013

Marek Olsberg, pianiste renommé, s’apprête à jouer au Philarmonique de Berlin. Quelques heures avant, nous commençons à faire sa connaissance ainsi que celle de son assistante et de quelques privilégiés qui ont l’intention d’assister au concert dont le point d’orgue sera la Sonate nº 29 de Beethoven. Une forme proche du théâtre par la fragmentation des scènes et la construction en 3 actes (avant, pendant et après la représentation) pour une tragédie sans cri ni grandiloquence. Simplement le basculement, le trébuchement, la fissure, l’inattendu dans un quotidien si lisse en apparence. Quelques vies bien huilées dans une société aseptisée quand soudain… Sulzer, écrivain suisse alémanique (région du monde paisible, sans aspérité en apparence s'il en est !) est un mélomane à l’écoute de ses contemporains qu'il croque avec sagacité.

Bande d'arrêt d'urgence (Woodrow PHOENIX)

note: 3...Anonyme - 26 novembre 2013

Personnellement touché par plusieurs drames de la route dont la mort de sa sœur à 11 ans, Woodrow Phoenix, écrivain, graphiste et designer anglais, sort un bd comme un cri. Mais il ne se contente pas d’une critique basique en nombres d’accidents et autres statistiques abstraites. Il propose une réelle réflexion sur l’objet voiture, ses représentations symboliques, leur influence sur l’économie et pire sur nos comportements sociaux. Le graphisme met en évidence l’omniprésence dans notre univers visuel de la signalétique circulatoire comme un carcan quotidien. Enveloppés dans une bulle (notre véhicule) reflet de ce que nous voulons montrer de nous (réussite sociale, compétitivité, agressivité…), confortés dans cet autisme méprisant par l’industrie automobile et ses publicités de promesses de réalisation de soi et de bonheur… Choquant et intelligent, à mettre en les mains des jeunes conducteurs comme des plus aguerris, ayant souvent oublié quelle arme ils tenaient entre leurs mains.

Millefeuille (Nouri BOUZID)

note: 3Révolution de Jasmin Laëtitia - 14 novembre 2013

Ce film est l’un des premiers à traiter de la «Révolution de jasmin» (2010-2011), ou comme disent les Tunisiens, de la «Révolution de la dignité». La première scène s’ouvre sur une manifestation sévèrement réprimée par les forces de l’ordre, avec le fameux slogan «Dégage» scandé par ceux qui précipiteront la chute du Président Ben Ali. C’est à cet instant crucial que l’on découvre les deux héroïnes du film qui sont en train d’écrire l’Histoire de leur pays. Mais c’est sous l’angle intimiste que Nouri Bouzid choisit de filmer la révolution. Aïcha et Zaineb sont inséparables et travaillent toutes deux dans un salon de pâtisserie nommé «Millefeuille», ce qui donnera lieu à une scène de chant où le millefeuille devient une parabole de la vie politique tunisienne dont les différentes couches culinaires évoquent la multitude des partis engagés dans la bataille pour le pouvoir. Elles représentent toutes deux le combat des femmes à être elles-mêmes : Aïcha porte le voile, lutte contre son employeur qui la pousse à l’enlever et prouve qu’être musulmane n’est pas incompatible avec le combat pour l’émancipation, tandis que Zaineb se rebelle contre sa famille qui voudrait le lui faire porter en vue de son futur mariage. Hormis quelques clichés, un film à savourer.

La Confrérie des chasseurs de livres (Raphaël JERUSALMY)

note: 3... Laëtitia - 12 novembre 2013

L’intrigue de ce roman débute par un présupposé fantaisiste : Et si Villon (dont on a mystérieusement perdu la trace à 31 ans) était devenu l’émissaire du roi Louis XI qui, en échange de sa grâce, en fait un pion essentiel dans sa bataille politique contre Rome ? Villon va utiliser deux leviers pour y parvenir : en incitant un imprimeur allemand à s’installer à Paris afin de diffuser des oeuvres subversives pour la Papauté,ensuite, en partant pour la Terre Sainte afin de se mettre en contact avec la confrérie des chasseurs de livres. En effet, aidée des Médicis, cette confrérie, qui cache dans la Jérusalem d’en bas des manuscrits rares sauvés pour la plupart de la fameuse bibliothèque d’Alexandrie, œuvre aussi pour la divulgation de la connaissance au plus grand nombre. La quête de notre héros va donner lieu à une multitude de rebondissements où les retournements d’alliance sont légion. Car le pouvoir des mots est immense : détenir certains livres, c’est ici enclencher une guerre culturelle et détenir le pouvoir. En libre-penseur, Villon prend peu à peu conscience de sa véritable mission (non celle imposé par le chantage royal) : libérer la parole de la censure et de l’élitisme, pour mieux affranchir l’homme. L’auteur, tout en s’inspirant de l’Histoire pour mieux s’en émanciper, nous livre un bijou d’érudition, à la croisée du roman picaresque et du roman ésotérique.

Would you have sex with an Arab ? (Yolande ZAUBERMAN)

note: 3...Anonyme - 9 novembre 2013

« Would you have sex with an arab » se décline en » would you have sex with a jew ? » (question pas strictement symétrique: would you have sex with a muslim?)en Israël, pays dont 1/5e de la population arabe musulmane cohabite avec une majorité juive. Bien-sûr, la question paraît provocante tant il semble peu sérieux de s’intéresser au conflit israelo-palestinien en dessous de la ceinture quand il est déjà si complexe dans les niveaux supérieurs et tant on peut s’attendre à des réponses aussi convenues que tranchées.Evidemment, Y. Zauberman n’a pas simplement cherché un titre accrocheur, sa question promenée dans les boîtes branchées de Tel-Aviv nous plonge dans une intimité inhabituelle pour comprendre le ressenti des uns et des autres. Du sexe militant au sexe pour le sexe, à l’attrait de l’interdit en passant par le rejet, les réponses visitent tout le répertoire des possibles. Elle n’interroge pas seulement les étudiants, elle donne aussi la parole aux personnes nées de couples mixtes en une époque où ce choix rare faisait figure d’utopie politique.
Au-delà du documentaire sur le conflit, la question de Y.Zauberman tend à l’universel dans son aspect culturel. Comment se forment le désir et l’objet du désir ? Nul besoin d’être en guerre pour se poser la question de l’influence sociale, politique et culturelle sur nos choix de partenaires, nos attractions/ répulsions.

Le Dernier seigneur de Marsad (Charif MAJDALANI)

note: 3...Anonyme - 23 octobre 2013

Avec son dernier roman, Majdalani nous offre une fois encore une histoire du 20e siècle libanais à travers une saga familiale. Mais pas de déjà-vu avec cet authentique conteur maniant le verbe et l’allégorie avec panache. Marsad est un quartier chrétien orthodoxe enclavé dans le Beyrouth-ouest à majorité sunnite. Et son seigneur dans les années 60 est Chakib Khattar, au sommet du pouvoir et des richesses d’une lignée d’abadayes respectés. Le titre augure le récit d’une chute fatidique sous le double impact du délitement de sa famille et des déchirements communautaires du pays. Le dernier seigneur de Marsad est le Guépard du Liban. Majdalani crée un personnage à la mesure du dernier aristocrate sicilien de Giuseppe Tomasi, prince de Lampedusa, qui mériterait à son tour un Visconti pour lui rendre hommage à l’écran. La force de l’auteur repose sur son incroyable pouvoir d’incarner des personnages en profondeur, vivants, palpitants dans notre imagination. Ce roman est surtout le récit de la disparition d’un système d’organisation politique et sociale reposant sur les familles et leur maître, entre noblesse et vulgarité, compassion et injustice, qui vola en éclats sans pour autant apporter la paix entre les communautés religieuses.

César doit mourir (FRERES TAVIANI)

note: 4Spécial Festival du film italien d'AnnecyAnonyme - 23 octobre 2013

Cesar doit mourir, avec cette sentence comme titre, Les frères Taviani nous font pénétrer dans l’univers carcéral par la porte de l’art. Plusieurs paris étonnants dans cette œuvre des vénérables réalisateurs italiens octogénaires (Good morning Babylon, Padre padrone, La Nuit de San Lorenzo…) . La forme d’abord, documentaire par le sujet ( vrai montage d’une pièce de Shakespeare dans la prison rebibbia à Rome ) et les protagonistes (réellement condamnés du quartier de haute sécurité), fiction par la mise en scène de leurs répétitions. La limite entre les deux est parfois nette dans un regard appuyé à la caméra, ou floue comme lors d’un règlement de compte entre détenus.
La multiplicité des thèmes abordés ensuite, la création, l'intemporalité de la relation du pouvoir et du crime, l’art rend-il libre ?...
Le décor enfin, la force tragique des textes de Shakespeare résonne magistralement dans l’architecture carcérale filmée en noir et blanc. Tout comme les répliques sur le pouvoir, la liberté, la trahison, la vengeance, font écho à leur passé et retentissent puissamment dans la bouche de ces criminels. Une œuvre très maitrisée et intense.

Les (vraies !) histoires de l'art (Sylvain COISSARD)

note: 3Détours tordantsAnonyme - 18 octobre 2013

C’est un petit livre discret, très instructif.
Il mérite toute sa place parmi les documentaires détaillés qui initient les jeunes lecteurs à l’Art… Ah l’Art … sujet si riche et si vaste. Heureusement, voici de quoi sourire, pouffer, voire rire (oh !?), et si l’on rit, intérêt et curiosité s’animent pour découvrir au passage, quelques toiles incontournables.
Cette impression d’entrevoir une vérité - enfin - le pourquoi du comment détourné, c’est d’une grande satisfaction.
C’est donc un petit livre discret, très instructif, mais surtout très drôle.

Le Quatrième mur (Sorj CHALANDON)

note: 4Au Pays du cèdre Laëtitia - 17 octobre 2013

«Je n’avais vu du Liban que la ville. Brusquement, au pied des collines sèches, des oliviers, des pinèdes à perte de vue.Marwan lisait mon silence. Les cascades, les montagnes, les cèdres, les femmes et les hommes d’Aley, cœurs de pierre et de miel. Je me suis laissé aller contre la vitre. Nous avions abandonné la guerre de l’autre côté. J’ai imaginé Aurore et Louise (...).Je les aurais voulues ici, le temps du petit lac, de l’enfant sur son âne, du vieillard assis en bord de route,de l’aigle royal ». Correspondant de guerre entre 1973 et 2005, l'auteur a mis longtemps avant de s’autoriser à mettre sa plume au service de la fiction. Alors qu’il nous avait ému avec «Mon Traître», évoquant l’histoire de l’Irlande du Nord,il récidive avec «Le 4em mur», qui relate la guerre du Liban. Georges est son double de papier (car Sorj, c’est Georges en breton). Militant d’extrême-gauche et étudiant en théâtre, il rencontre Sam, metteur en scène grec et juif ayant fui la dictature des Colonels,scellant une amitié fraternelle si forte qu’elle poussera Georges à relever un incroyable défi : remplacer au pied levé Sam et aller à Beyrouth monter «Antigone» d’Anouilh,avec des comédiens constituant la mosaïque confessionnelle libanaise – palestinienne, druze, chiite, chrétienne maronite, etc-.Mais rien ne se passera comme prévu, avec en ligne de mire Sabra et Chatila…

La Piel que habito (Pedro ALMODÓVAR)

note: 4... Laëtitia - 10 octobre 2013

Libre adaptation de «Mygale» de Thierry Jonquet, ce film est un grand cru du cinéaste ibérique. Abandonnant la flamboyance tant au niveau de la forme (adieu couleurs chaudes et décor psychédélique) que du fond (adieu la Movida et ses histoires transgenres), Almodovar s’empare du film noir pour mieux le distordre et lui imprimer sa marque. Car rassurez-vous, il n’a rien perdu de sa verve ni de ses névroses ! C’est l’histoire du chirurgien plasticien Ledgard, sorte de docteur Frankenstein, qui travaille sur le renouvellement cellulaire et se livre à des expériences sur des cobayes humains à l’abri des regards dans sa somptueuse propriété « El Cigarral », secondé par sa nourrice Marilia. Obsédé par la disparition tragique de sa femme, morte brûlée vive, il tient captive Vera, nouvelle Eve qu’il modèle à l’image de la femme aimée et qu’il épie via un immense écran plasma. Ou du moins est-ce l’une des nombreuses illusions concoctées par Almodovar, spécialiste des chausse-trappes, qui en multipliant les strates narratives, se joue du spectateur et l’amène à un retournement complet de situation. Mais n’en disons pas plus afin de laisser le suspens intact et… bon film !

En attendant Robert Capa (Susana FORTES)

note: 3Centenaire de la naissance de Robert CapaAnonyme - 8 octobre 2013

S.Fortes,auteure espagnole, fait le pari de présenter Capa à travers les yeux de sa compagne Gerta Taro. Et ce point de vue n’est pas inintéressant car cette femme était aussi son manager. Elle créa l'identité que nous lui connaissons à travers le monde. Lorsqu’ils se rencontrent dans le milieu d’extrême gauche dans les années 30 à Paris, ils se nomment André Friedmann et Gerta Pohorylle et sont réfugiés juifs de Hongrie et Pologne. Ils ont 20 ans dans une Europe en grève et gangrenée par le fascisme.Il lui apprend la photo,en contrepartie,elle prend en main sa carrière, lui qui ne sait pas vendre ses reportages. Promethée visionnaire, elle crée Robert Capa, photographe américain surdoué et insaisissable. André Friedmann endosse le costume sans effort. Il faut dire qu’il partage des points communs avec le personnage que lui a taillé Gerta sur mesure: charmeur, audacieux. Dépassée par sa créature,elle connaitra l’injustice subie de nombreuses femmes oubliées de l'histoire au détriment de leur homme…Couple moderne avant l’heure, entre insouciance de la jeunesse et violence de l’actualité, croisant Cartier-Bresson,Hemingway, Tzara. La belle et sa bête gagnent l’Espagne pour couvrir la guerre civile,partisans des républicains. Gerta n’en reviendra pas. Ce livre entre bio et roman historique, rappelle les Aventures de Boro (Franck et Vautrin illustrées par Bilal). Rappelez-vous,le reporter hongrois inspiré d'un certain…Capa!

Pitt ocha et la tisane de couleurs (LES OGRES DE BARBACK)

note: 3...Anonyme - 2 octobre 2013

Avec ce troisième volet, les Ogres de Barback continuent de nous entraîner dans leurs valises, agrémentées d’invités tranquilles, et d’un choix de morceaux qui fera fredonner petits et grands marmots.
Aux amateurs de chansons française et à ceux qui aiment la découverte, bon voyage.

Gangs of Wasseypur - partie 1 (Anurag KASHYAP)

note: 4...Anonyme - 28 septembre 2013

Wasseypur, quartier minier de la région du Jharkhand à l'est de l'Inde, est le théâtre d’une lutte sans merci pour le pouvoir entre deux familles. Celle de Shahid Khan contre celle de Ramadhir Singh, une évocation sur 4 générations de 1930 à 2006. L’exploitation des mines de charbon laisse place au trafic de ferraille et d’armes en passant par l’extorsion de cotisations syndicales et autres manipulations politiques, autant d’activités illégales et lucratives que se disputent les clans sous le regard détourné d’une police corrompue. Initiations, trahisons, amours et naissances rythment les saisons des caïds. Tous les ingrédients sont là pour un solide scénario de film de gangster sauce indienne. Et là, bonne surprise, réalisateur et scénaristes, nous promènent loin des sentiers kitschs bollywoodiens, dans une chevauchée épique entre le Parrain de Coppola pour la saga et Election de Johnnie To pour la mise en scène. La musique jaillit à tous propos et les paroles des chansons agissent souvent comme dialogue, sous-titre d’une scène. Cette fresque sanglante et non dénuée d’humour, a tout pour devenir un film dont on se souviendra longtemps, un classique du genre. Vive le nouveau cinéma indien !

Babycall (Pal SLETAUNE)

note: 3... Laëtitia - 27 septembre 2013

L’histoire se passe en Norvège, l’interprète principale –magistrale Noomi Rapace- est suédoise, mais les thèmes évoqués sont universels : Anna, mère célibataire, emménage dans un grand ensemble d’immeubles avec son fils de 8 ans, Anders, pour fuir un ex-mari ultra-violent. Elle tente de reprendre le dessus mais très angoissée, elle ne peut s’empêcher de surprotéger son fils en l’attendant face à l’arrêt de bus de l’école ou encore en achetant un « babycall » de façon à s’assurer que tout se passe bien pendant son sommeil. Le décor, triste à pleurer, une barre d’HLM évoquant une prison, entourée de parkings et de supermarchés, reflète bien la solitude urbaine, lieu propice à l’irruption du fantastique, par le biais du babycall captant des bruits étranges –cris d’enfant, bruits de coups- semblant venir d’un autre appartement. Mais perdant parfois contact avec le réel –Anna croit voir un lac là où il y a un parking-, l’héroïne et le spectateur s’interrogent : ce qu’elle entend, ce qu’elle voit, serait-ce le fruit de sa paranoïa ou la sordide réalité ? A la lisière du thriller psychologique et du fantastique, un beau film sombre et marquant.

Des Larmes sous la pluie n° 1 (Rosa MONTERO)

note: 3... Laëtitia - 21 septembre 2013

Ce titre est un hommage au film «Blade Runner », dont il emprunte l’atmosphère apocalyptique (ghettos à l’air pollué, eau rationnée) et la quête existentielle de certains réplicants, comme Myriam Chi, leader du MRR ou Mouvement Radical Réplicant, qui prône la fierté d’être réplicant et le droit à ne pas être citoyen de seconde zone. Nous sommes aux Etats-Unis de la Terre, en 2109, où les humains et les autres espèces se côtoient avec difficulté. Bruna, ex-réplicante de combat devenue détective, marginale au sein même de sa communauté pour avoir des émotions exacerbées, est engagée par Chi pour enquêter sur des morts de réplicants dues sans doute à l’implant de mémoires adultérées les rendant fous et les poussant au crime. S’agit-il d’un complot des Suprématistes, équivalent du Ku Klux Klan anti-réplicant ? Et qui manipule le contenu des Archives Centrales et dans quel but ? Aidé de l’archiviste humain Yiannis, du détective Lizard et d’une faune de marginaux, Bruna va mettre à jour un véritable complot et découvrir en même temps que certains de ses souvenirs ne sont pas tous artificiels… De la SF humaniste.

Le Faucon errant (Jamil AHMAD)

note: 4Découverte d'un autre mondeAnonyme - 20 septembre 2013

Une suite de récits courts
qui nous permet de découvrir un monde hostile et cruel des zones tribales. Un livre passionnant.

The Grandmaster (Kar-wai WONG)

note: 3...Anonyme - 19 septembre 2013

Le dernier et tant attendu Wong Kar-Wai est une biographie sublimée d’un maître de kung-fu du sud de la Chine, Ip Man (maître de Bruce Lee), dans les années 30 à 50. Utilisant les codes du genre - combats chorégraphiés et codes d’honneur -il n’en délaisse pas pour autant sa propre écriture : plastique sophistiquée, ralentissements, ellipses, mélancolie… The grandmaster, c’est l’ésthetique d’WKW même dans les combats -à couper le souffle- jusqu’au bout des pieds, d'un quai de gare, d'une maison close...Un combat à mains nues est le théâtre de l’unique et mémorable scène érotisante du film. L’histoire d’Ip Man illustre parfaitement le destin chinois de l’époque, jeune homme riche et raffiné qui perdit tout quand son pays bascula d’orgueilleux Empire à territoire occupé par l’ennemi japonais, dans un monde au bord d’une guerre mondiale. Le réalisateur agrémente cette biographie déjà romanesque, d’un amour non assumé et non consommé (tiens tiens …In the mood for love, 2046 !) partagé avec la fille du maître de Kung-Fu du nord de la Chine, dont l’assassinat par un disciple fera l’objet d’une vengeance bien-entendu ! Un film d’arts martiaux entre grand spectacle et film d’auteur.

Truite à la slave (Andreï KOURKOV)

note: 3...Anonyme - 7 septembre 2013

Soleïlov, ancien policier reconverti en détective, se voit confier l’enquête sur la disparition de Dimytch Nikodimov, patron et chef du restaurant « Au Casanova » à Kiev. En quelques jours et très peu de pages, sa vie va être entièrement bouleversée. Impossible de révéler plus d’informations sans compromettre le suspense d’une si courte nouvelle ! Alors comment vous mettre en appétit ? Commençons par le titre gastronomique, prélude à une série de petits plats slaves, le récit se déroulant au gré des menus. Puis continuons par le style, sobre et finement satirique avec un arrière-goût d’une nouvelle de Gogol. Pour finir, l’auteur lui-même, certainement le plus en vue des écrivains ukrainiens contemporains, dont la galerie de personnages burlesques a déjà séduit de nombreux lecteurs dans le monde (Laitier de nuit, Le Pingouin, Caméléon disponibles à la médiathèque). Un petit plaisir en perspective… Nevski !

La Corne d'abondance (Juan Carlos TABIO)

note: 3..Anonyme - 3 septembre 2013

Vous cherchez une comédie originale et dépaysante ? Ce conte cubain est pour vous. Un modeste village se trouve bouleversé par l’annonce d’un héritage colossal déposé par des religieuses au 18e siècle dans une banque anglaise, destiné aux descendants Castineiras. Tous les Castineiras, nombreux et désunis, entament une course administrative pour prétendre à la manne providentielle. La cupidité n’est pas le seul venin de l’affaire, le réalisateur ne manque pas de montrer la réelle difficulté des familles à vivre décemment. Sans tourner au brûlot politique contre le régime- cette histoire pourrait se dérouler sous d’autres latitudes soulevant les mêmes problématiques- Tabio taquine ses compatriotes quel que soit leur bord. Le petit plus de cette comédie honnête réside dans l’exotisme d’une sensualité latine.

Ouz (Gabriel CALDERON)

note: 3...Anonyme - 29 août 2013

Ouz, Ore et Ex, trois pièces décapantes d’un jeune dramaturge urugayen. Une fois encore, même si le théâtre n’est pas votre répertoire de lecture habituel, n’ayez crainte, l’écriture dynamique de ces textes vous plonge rapidement dans des récits rythmés à faire pâlir un scénario hollywoodien. Les protagonistes et les contextes réalistes au départ glissent vers un chaos irrationnel : une sainte femme sur le point de tuer l’un de ses enfants pour obéir à dieu, une réunion de famille à noël dont la plupart des convives sont déjà morts et même des extraterrestres kidnappeurs. Comme beaucoup de ses compatriotes sud-américains, Gabriel Calderon interroge son pays ensanglanté par la dictature dans les années 70 : la torture, les enlèvements, les victimes, les bourreaux, l’armée…et quand le peuple est enfin libéré d’un joug politique, il prend dieu pour dictateur… Usant de l’absurde et d’un humour féroce, il évoque les crimes, la culpabilité, la misère sociale et tous les maux du puits vertigineux de l’âme humaine sur un air jubilatoire et délirant.

Le Dernier lapon (Olivier TRUC)

note: 3... Laëtitia - 27 août 2013

Le polar ethnologique se porte bien. Après le shérif cheyenne Longmire de Craig Johnson, voici l’inspecteur Klemet Nango, un sami, et sa coéquipière Nina, tous deux affectés à la «police des rennes». Le vol d’un tambour traditionnel usité par les chamans, allié au meurtre de Mattis, éleveur de rennes, va réactiver les tensions existant entre les communautés norvégienne et sami.Un policier raciste, un politicien corrompu, un géologue français, un éleveur de rennes vivant en autarcie, la liste des suspects s’allonge… Cette double enquête sera aussi l’occasion de découvrir les us et coutumes du dernier peuple aborigène d’Europe, les Sami, de saisir les véritables enjeux que cachent les faits, à savoir la chasse au trésor que se livrent les pays scandinaves en quête des réserves naturelles (or,uranium), avec le risque que la Laponie devienne un Far West scandinave. Empreignez-vous des paysages rudes et enneigés de Laponie, de la poésie née de la fin de la nuit polaire : « La lueur magnifique se reflétait de plus en plus ardemment sur quelques nuages qui reposaient mollement au loin. Nina était saisie. On voyait nettement un halo vibrionnant troubler le point d’horizon que chacun fixait. Nina ne connaissait pas ce phénomène, mais elle en ressentait pourtant pleinement la puissance charnelle et même spirituelle.Klemet paraissait observer son ombre dans la neige comme s’il découvrait une magnifique œuvre d’art».

Les terribles aventures du futur Capitaine Crochet (Jim V HART)

note: 4Même le plus terrible des méchants a un passéAnonyme - 14 août 2013

Un titre accrocheur...pour un roman qui tient ses promesses. Si aux premiers chapitres, cet adolescent ne se distingue des autres que par son caractère bien trempé, il évolue au fil des aventures en un personnage rétif à l'autorité. A la fin, tous les ingrédients sont là, jusqu'au crochet lui-même. A lire dès 12 ans.

Rimbaud l'indésirable (Xavier COSTE)

note: 3... Laëtitia - 1 août 2013

Jeune auteur de BD, Xavier Coste, après s’être intéressé au destin d’Egon Schiele, nous livre « Rimbaud l’indésirable », ou sa vision d’un poète au destin aussi fulgurant qu’un météore. Il s’agit d’un diptyque, la première partie évoquant la montée à Paris de Rimbaud, les affres de la création, sa rencontre avec Verlaine et leur errance alcoolisée à travers l’Europe – illustrée par de superbes planches sur Paris, Bruxelles et Londres-. Puis une page noire permet une coupure symbolique entre les deux vies du poète, la deuxième partie étant consacrée à ses voyages commerciaux à travers l’Afrique, notamment au trafic d’armes. Du point de vue narratif, les dialogues alternent avec des extraits de lettres et de poèmes (tels « le sonnet du trou du cul », « le bateau ivre »). Quant à la forme, on appréciera la ligne claire, mais aussi les tons chauds utilisés dans la deuxième partie pour mieux nous immerger dans la chaleur harassante de l’Afrique. Une BD biographique à découvrir absolument.

Les Corrections (Jonathan FRANZEN)

note: 3 Check-up familialAnonyme - 27 juillet 2013

Encéphalogramme, électrocardiogramme d’une famille classe moyenne supérieure du Midwest wasp et tranquille. Presque une dissection tant l’analyse est détaillée,l’auteur soulève une peau de souvenir, puis une autre jusqu'à l’os.Grinçant de l’humour insolent de Franzen,ce roman fleuve est dense sous des airs de banalité. Dans la famille modèle il y a le père ingénieur, un homme un vrai,travailleur comme les jeunes générations gavées de loisirs n’en font plus…muré dans l’incapacité d’exprimer ses sentiments. L'insipide mère au foyer, fidèle au Temple le dimanche,adepte des plats équilibrés,obsédée par ce que les autres peuvent penser. Puis les enfants comme autant de réactions/corrections à leur éducation:Gary,arriviste décomplexé, Chip, intellectuel instable et endetté, Denise, chef de cuisine aussi rigoureuse dans son métier que dispersée dans sa vie privée tant elle est incapable de savoir qui elle est. Le récit anachronique est sans concession,même dans la description de la déliquescence du père atteint d'Alzheimer et du massacre de noël, symbole du bonheur familial pour la mère. Bien-entendu, cette satire familiale est aussi celle de la société américaine, éducation et industrie pharmaceutique en tête. Il faut attendre la fin des 700 pages pour une touche de bienveillance à l’égard de ces êtres déviants mais aussi aimants, car rien n'est immuable,tout peut être corrigé…

Le Sang des fleurs (Johanna SINISALO)

note: 3... Laëtitia - 26 juillet 2013

L’histoire se passe dans un futur proche en 2025, en Finlande. Partant d’un phénomène scientifique inexpliqué jusqu’à ce jour – la disparition massive de colonies d’abeilles-, l’auteur imagine un futur où le problème aurait dégénéré, la plupart des pays étant touchés par une grave crise agricole. La trame de l’histoire se situe en Finlande, rare pays épargné, jusqu’au jour où Orvo, apiculteur passionné, est confronté à la désertion inquiétante de deux ruches. Par hasard, il découvre dans le grenier une ouverture qui lui donne accès à un univers parallèle duquel l’homme semble absent et les abeilles bien vivantes. Orvo suppose que sa découverte pourrait avoir un lien avec la situation actuelle et mène l’enquête. Une double narration se tisse alors, se répondant en écho, soulevant des thématiques identiques –préoccupation environnementale en tête-, celle d’Orvo, traumatisé par la mort de son fils Eero, et celle d’Eero, écoterroriste, par le biais d’extraits de son blog. Cette alternance récit classique et éclairage scientifique permet à l’auteur de mettre en avant son engagement écologique et de nous alerter sur la fin programmée des abeilles, le risque de se nourrir de viande rouge, les abattoirs aux méthodes cruelles. A mi-chemin entre récit fantastique et livre à thèse, goûtez ce miel littéraire.

Markheim (Philippe MARCELE)

note: 3...Anonyme - 26 juillet 2013

Markheim c’est le nom de la ville brumeuse où revient Ans, homme à l’identité aussi floue que le lieu et la mission qui l’y amène. Tout est flottant dans Markheim. Agent secret dans la force de l’âge, le mystérieux Ans retrouve les empreintes de son enfance et les bras d’une ancienne amante. L’atmosphère enveloppante devient de plus en inquiétante depuis que nuit après nuit, il est visité par le rêve troublant d’un vieillard qui lui ressemble. Dans un glissement de l’un à l’autre, le temps et l’espace perdent leur cohérence. Il n’y plus de début, plus de fin, le serpent se mord la queue. Le dessin ciselé semblable à de la gravure sert magnifiquement cette histoire onirique pleine de charmes. Markheim, l’espace d’une vie, l’espace d’un rêve…

La trilogie des gemmes n° 2
Bleu saphir (Kerstin GIER)

note: 5Bleu saphirAnonyme - 23 juillet 2013

Un seul mot : génial

7e étage (Asa GRENNVALL)

note: 3...Anonyme - 20 juillet 2013

Cette BD est la réalisation de fin d’études d’Asa Grennval, étudiante en art devenue depuis une dessinatrice reconnue en Suède. Autobiographie en noir et blanc de ses années estudiantines, réputées insouciantes, qui furent pour elle des années d’enfer. Pourtant tout commençait bien avec la rencontre de Niels, charismatique jeune homme qui la courtise, elle qui manque d’assurance. Il lui fait d’abord preuve d’un amour débordant avant de la couvrir de reproches puis de la maltraiter physiquement et psychologiquement. Tout est violent, le dessin, les propos, les gestes. Bien-entendu, le dessein de l’auteure n’est pas simplement de choquer, elle déroule les mécanismes qui piègent la victime et la figent jusqu’à la détonation qui fait voler ce système en éclat. Asa Grennval prouve la possibilité (et la nécessité !) de s’en sortir mais elle ne vend pas de rêve. Elle ne ment pas sur la détresse qu’elle a pu connaître même après la rupture et un douloureux procès, la longue route pour se reconstruire, jamais réellement terminée. Une bd courageuse soutenue par Amnesty international, proposée en France par L’ Agrume, jeune maison d’édition à suivre…

La Dernière piste (Kelly REICHARDT)

note: 3...Anonyme - 16 juillet 2013

1845, trois familles de pionniers protestants parcourent l’Oregon vers l’ouest avec pour tous bagages une roulotte, un tonneau d’eau et la bible. Traversant des paysages arides depuis plusieurs semaines et bientôt à cours d’eau, ils ne tardent pas à soupçonner leur guide, un trappeur grossier, de les avoir définitivement perdu. Involontairement par ignorance de la piste ou intentionnellement pour se débarrasser de ces nouveaux arrivants déversés par le vieux continent ? Paradoxalement les vastes espaces deviennent le décor d’un huis-clos étouffant, où la paranoïa atteint son paroxysme avec l’apparition d’un indien. Ce western des origines offre une vision épurée du mythe fondateur américain, une séquence hyperréaliste presque en temps réel de l’avancée vers l’ouest. Malgré le quasi mutisme et la torpeur, la violence de l’installation, pour les pionniers comme pour les natifs, est bel et bien rendue, presque sans coup de feu. Une version qui laisse aussi une place aux femmes dans une partie de l’histoire souvent associée à la virilité bestiale des hommes-revolvers.

La Yuma (Florence JAUGEY)

note: 4... Laëtitia - 13 juillet 2013

La Yuma : Florence Augey
Connaissez-vous le cinéma nicaraguayen ? La Yuma est une excellente occasion de l’appréhender au travers du quotidien des habitants des barriadas, quartiers mal famés de Managua, avec leur cortège de maux : délinquance juvénile, drogue comme économie parallèle, violence machiste, etc. Mais loin d’être plein de noirceur, ce film est lumineux, notamment par la présence charismatique de l’héroïne, Yuma, qui fait face à l’adversité en toutes circonstances. Yuma poursuit son rêve d’être boxeuse, s’entraînant sans relâche. Ceci n’est pas un film sur la boxe, mais sur une passion qui permet à Yuma d’être digne et respectée, un moyen de sortir un jour de son quartier et de prétendre à une vie meilleure. De sa courte liaison avec Ernesto, étudiant de la classe moyenne, à l’amitié qui la lie à un groupe de pandilleros de son quartier, on suit avec plaisir le chemin initiatique d’une fille que rien ne peut arrêter.

La Servante et le catcheur (Horacio CASTELLANOS MOYA)

note: 3Bienvenue en Enfer Laëtitia - 4 juillet 2013

Ce roman écrit au scalpel est une peinture sombre du Salvador des années 70, en pleine guerre civile.Souvent comparé à Céline pour son écriture sans fioritures,parfois vulgaire mais néanmoins efficace,l'auteur nous immerge dans un pays miné par l’ultraviolence, aussi bien celle de la dictature sous Duarte,que celle des opposants au régime. Pendant 48 heures,à San Salvador,l’horreur du quotidien, fait d’enlèvements,d’attentats et de tortures,passe par le regard de quatre personnages principaux : celui de Maria Elena (la servante),toute dévouée à ses patrons,et qui se donne pour mission d’apprendre ce qui est arrivé à un couple de jeunes gens de la famille, disparus à leur retour d’URSS ; celui du Viking, ancien catcheur devenu flic tortionnaire ; celui de Joselito, petit-fils de Maria Elena, étudiant et engagé politiquement jusqu’à devenir terroriste ; et enfin celui de Belka, fille de la servante, qui incarne la lâcheté ordinaire, préférant rester neutre et fermer les yeux sur les atrocités. Ces destins vont s’entremêler inexorablement dans une tragédie oedipienne, les enfants tirant sans le savoir sur leurs propres parents, les mères cachant à leurs enfants l’identité du père. Ce roman d’une plongée en enfer, qui n’est pas à mettre entre toutes les mains, reste une radiographie aussi réussie que dérangeante de l’histoire de tout un peuple d’Amérique centrale, un véritable uppercut.

Dirty old town (Daniel LEVIN)

note: 3...Anonyme - 26 juin 2013

Caractéristique d’une nouvelle vague new-yorkaise,ce film à petit budget, met en scène la ville sous une forme oscillant entre documentaire et fiction onirique sur fond d’indie rock. The Lower east side, quartier populaire de Manhattan, mêlant populations immigrées et working-class, connaît un processus de"gentrification"(embourgeoisement,boboïsation!), largement appliqué dans les villes américaines,consistant à réaménager les zones sensibles afin d’apporter plus de confort et de mixité sociale. Ces changements sont parfois vécus comme la disparition d’une culture. C’est ce crépuscule que filment les réalisateurs,à travers l’histoire de Billy Leroy,propriétaire d’une brocante excentrique menacée d’être rasée et remplacée par un starbuck si le loyer n’est pas payé dans les 72h. William Leroy,français émigré enfant à NY,joue son propre rôle dans le film,comme les autres protagonistes, il n'est pas comédien professionnel. Le jeu spontané rappelle sans doute le maître Cassavetes. Le scénario pourrait virer glauque à force de trafics,flic miteux,jeune prostituée sous substances, mais il n’en est rien. Le film est sauvé par une certaine fraicheur,des amitiés sincères,de l’humain palpitant sur le béton, pour s’achever comme un conte urbain. A la juste image de son titre tiré de la chanson d’Ewan MacColl reprise par les Dubliners et les Pogues,dans Dirty old town, il y a du dégoût et de la tendresse.

Le Chiffre (René ZAHND)

note: 3...Anonyme - 25 juin 2013

Quelques temps après la chute de Mobutu en 1997, on retrouve deux gardiens toujours en poste dans une luxueuse propriété en Europe du chef d’Etat africain fraichement déchu. De ce fait divers, René Zanhd, directeur adjoint du Théâtre de Lausanne-Vidy, fait une courte pièce à la demande et dédiée aux artistes burkinabè, Hassane Kouyaté et malien, Habib Dembélé. Bab et Sane, livrés à eux-mêmes, sans information de l’extérieur, s’enferment dans la « villa Paradis » comme le capitaine Drogo dans le fort Bastiani attendant l’ennemi qui viendra peut-être… L’attente, l’angoisse, les interrogations, le vain espoir trouvent ici écho entre les deux hommes comme Vladimir et Estragon « attendant Godot » dans le Désert des tartares ! L’humour et le désespoir affleurent sous la simplicité apparente des dialogues. Ressuscitant le dictateur disparu et son « scribe », les naufragés instaurent un jeu de rôle qui grignote imperceptiblement la réalité. Ce basculement dans la folie met en scène les mécanismes de l’irrésistible ascendant d’un homme sur un autre, la prise de pouvoir par le plus persuasif, le renoncement du plus fragile. Une leçon de psychologie politique sans grandiloquence, un texte humble qui respire la sincérité.

Good morning Babilonia (FRERES TAVIANI)

note: 3..Anonyme - 4 juin 2013

Les frères Taviani acceptent une commande hollywoodienne. Réalisant une fresque grand public destinée aux américains,ils réussissent néanmoins à conserver leurs codes personnels, à la manière des histoires populaires des veillées,mélange de réalisme social transcendé d’envolées poétiques dans la lignée de «Padre padrone»,«Kaos». Ils parviennent surtout à mettre la vieille Europe au cœur de leur diptyque américain par le personnage du père qui attend le retour des fils prodiges au fond de sa Toscane natale. 1er tableau :une famille renommée de tailleurs de pierres en faillite. Les 2 plus jeunes frères font la promesse de revenir des Etats-Unis avec l’argent pour remonter l’affaire de leurs aïeux. Après les travaux les plus humiliants,ils sont embauchés à la création des décors sur le tournage du film monument de David W Griffith, «Intolérance» en 1914,le film dans le film. 2e tableau :commence alors une histoire du cinéma. Les coulisses de la création des 1ers films au sein de la petite famille que constituait Hollywood à cette époque. Quelques anecdotes mais surtout une philosophie du 7e art naissant, confronté à la suprématie de l’art premier millénaire,l’architecture. Sans oublier l’histoire personnelle des frères comme une allégorie de l’utopie de l’égalité. Certes,certaines scènes appuyées et quelques images surannées ont mal vieilli,l’intérêt du propos demeure.

Kurden people (Marina GIRARDI)

note: 3...Anonyme - 1 juin 2013

C’est une vision sensible et condensée des kurdes, de leur origine médique à leur condition de peuple sans Etat englobé dans 6 pays (Turquie, Iran, Irak, Syrie, Arménie, Géorgie), que nous livre cette jeune dessinatrice italienne.
Retraçant en quelques évènements marquants la tragédie de ces hommes et femmes humiliés par l’histoire, bouc-émissaires sous les dictatures, déportés, emprisonnés, soumis aux choix du désespoir : le combat ou l’exil. Echoués dans les villes européennes après de sordides traversées clandetines, ils inspirent la méfiance voire le mépris. Cette BD a le mérite d’apporter un éclairage sur cette population méconnue dont la culture millénaire ne se résume pas au PKK