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Mon Trésor (Keren YEDAYA)

note: 3Faire le trottoir à Tel-Aviv Laëtitia - 5 juillet 2016

«Mon Trésor» est un film âpre, sans concession, un focus sur une facette méconnue et tabou de la société israélienne, à savoir la prostitution. Comme son titre l’indique, c’est aussi un film sur la filiation, en l’occurrence le rapport fusionnel entre une mère, Ruthie, qui se prostitue depuis de très longues années, et sa fille Or (dénommée «mon trésor» par sa mère), lycéenne qui enchaîne les petits boulots et s’acharne à vouloir sortir sa mère de cette ornière.
Oui mais voilà, il n’est pas si facile de se sevrer d’une addiction, et Ruthie doit ruser pour ne pas se laisser enfermer dans l’appartement par sa fille farouchement protectrice, pour avoir sa dose de sexe et de vie nocturne.
L’un des points forts du film, c’est sa grande force expressive, qui est inversement proportionnelle à la quantité des moyens déployés et qui se joue d’une économie de mots. Autre point fort, la grande performance d’actrice des deux héroïnes, notamment Ronit Elkabetz, qui d’habitude, avec son port altier, sa grâce naturelle, ressemble comme deux gouttes d’eau à la Callas, est ici méconnaissable, n’ayant pas hésité à malmener son corps pour mieux incarner la vertigineuse dégradation physique (et mentale) d’un être vivant dans des conditions extrêmes et misérables.
Le point faible du film, c’est le déterminisme social qui colle aux personnages et finit par balayer les espoirs du spectateur quant à une issue heureuse du récit.
Néanmoins, un premier film qui, malgré quelques lenteurs et maladresses, pousse à l’empathie et à la réflexion.

En Attendant Bojangles (Olivier BOURDEAUT)

note: 3Titre improbable pour un roman bohème.Anonyme - 28 juin 2016

Enorme succès littéraire pour un petit roman inattendu, preuve bienheureuse que les maisons d’édition ne font pas seules la pluie et le beau temps, les lecteurs ont aussi leur mot à dire.
Ce n’est pourtant pas une révolution littéraire, la trame narrative est d’une grande simplicité presque sans surprise, mais il se dégage de cette histoire buissonnière, un charme indéniable.
La force du récit, ce sont ses personnages hauts en couleurs auxquels on s’attache entre rire et pitié, dans une atmosphère fitzgeraldienne.
L’histoire pourrait commencer ainsi : et si Gatsby et Daisy avaient vécu à Paris et avaient eu un fils…

Stupor mundi (NEJIB)

note: 3Contre l’engourdissement du monde, stupor mundi.Anonyme - 25 juin 2016

Cette aventure médiévale, aux accents de « Nom de la rose », interroge dans un contexte de tensions culturelles alimentées par les obscurantismes religieux.
De nombreux thèmes sont traités à travers les aventures d’Hannibal Qassim El Battouti, descendant imaginaire du père bien réel de l’optique, Alhazen : les origines des sciences dures et des sciences humaines, l’obstination jusqu’au sacrifice de l’éthique des chercheurs, les fondamentalismes religieux de Bagdad à l’Italie…
La force de cette histoire tient pour beaucoup dans la réussite des personnages, variés et bien construits, ils prennent de l’épaisseur au fur et à mesure du récit.
Un peu de difficulté avec le graphisme au démarrage de la lecture, bien vite oubliée tant la narration vous emporte.

Les enfants de la résistance n° 2
Les enfants de la Résistance (DUGOMIER)

note: 4Splendidement brillantAnonyme - 18 juin 2016

En France, pendant la seconde guerre mondiale, un groupe d’enfants refuse d’accepter les injustices commises au nom de l’occupation et du nazisme et décide d’organiser la résistance au sein de leur petit village. Mais entre rebondissements et coups du sort, l’entreprise va s’avérer bien plus périlleuse que prévu…

Après un premier tome déjà riche en émotions, posant de belles bases pour une série réellement prometteuse, voici donc le second tome.

Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il est à la hauteur, tant d’un point de vue graphique que scénaristique.
Le cadre historique est impeccablement posé et mêle avec beaucoup de justesse et de lisibilité la réalité de la guerre à celle de la vie quotidienne, avec en prime un petit dossier illustré en fin de tome afin de permettre à ceux qui le souhaitent d’approfondir leurs connaissances.

Quant à l’’histoire, elle est magnifiquement menée. Impossible de ne pas se retrouver entrainé avec ces enfants volontaires (et sans aucun doute un peu inconscients) qui se sont lancés dans cette lutte sans réellement réaliser ce à quoi ils s’exposaient. Et au fil des pages, on vibre avec eux, on partage leurs doutes, leurs peurs, leurs angoisses… leurs pertes…

Car, oui, le sujet est grave, l’histoire est dure, les enfants ne sont pas épargnés et la fin du tome 2 ne ménagera pas le lecteur.

Et pourtant… pourtant, malgré un contexte bien sombre, la BD réussit le tour de force (on dira presque l’exploit) de ne jamais tomber dans l’horreur et le mélodramatique et de rester lumineuse, pleine d’innocence, de bravoure, d’espoir et de courage.

Entre divertissement et pédagogie, il ne fait aucun doute que cette série, dont le premier tome a déjà été récompensé par le Prix des Collégiens au festival d’Angoulême 2016, sera une des séries à suivre avec attention dans les années à venir.

A lire !


Le Temps des héros (Gérard CHALIAND)

note: 3Les héros ne sont pas légion. Vaut-il la peine de fréquenter des hommes du commun ? Kim-Vân-KiêuAnonyme - 7 juin 2016

Parce que 5500 ans d’histoire c’est colossal, parce qu’environ 6000 langues c’est cyclopéen, parce que le monde est un vaste puzzle culturel, nous n’aurons jamais le temps de tout lire, pas même les seuls textes fondateurs !
Belle initiative de Gérard Chaliand, cet ouvrage compile les morceaux choisis de la littérature épique de tous les continents : Chaka l’épopée Zoulou, La chanson de Nibelungen, La cantilène du Kosovo, Le Dit des Heiké, Chilam Balam de Chumayel, l’épopée de Gilgamesh…
Document rare, concentré de culture mais avant tout d’aventures, de passions, de batailles, de héros !



Le Monde extérieur (Jorge FRANCO)

note: 3Littérature colombienne Laëtitia - 7 juin 2016

On connaît peu la littérature colombienne en Europe, hormis Gabriel Garcia Marquez. Jorge Franco est pourtant un écrivain majeur, brassant les prix littéraires, dont le Premio Alfaguara de Novela, l’un des prix les plus prestigieux de la langue espagnole, pour «Le Monde extérieur».

Medellin, années 70, Don Diego, riche héritier colombien, est séquestré par des petites frappes et attend sa libération qui tarde à venir. Inspiré d’un fait divers, ce huis-clos repose sur un habile jeu d’alternance entre les époques et les personnages, permettant de mieux appréhender la personnalité de chacun, leur intériorité et les enjeux en cours. Ce récit tout en tension dramatique, mâtiné d’une touche de fantastique (que l’on nomme en Amérique latine realismo mágico), met en scène deux obsessions : celle de Don Diego pour la culture allemande et une pureté quasi aryenne, et celle du meneur du gang de ravisseurs, Mono, pour Isolda, fille de Don Diego.

La première obsession aura pour résultat la mise à l’écart de ce monde jugé impur d’Isolda, princesse fantasque pour sa famille, jeune-fille étouffant dans ce château sans réel contact avec la réalité, et surtout avec les jeunes de son âge.

La deuxième obsession, à la fois amoureuse et révélatrice de l’envie des exclus d’atteindre un idéal inaccessible (beauté, richesse, loisirs bourgeois) montre un Mono observant inlassablement Isolda jouant dans les bois, communiquant avec des animaux irréels et féeriques, puis plus âgée se dandinant en minijupe sur la musique des Beatles en l’absence de ses parents.

Un livre coup de poing sur la fracture sociale qui atteint son acmé avec la confrontation entre Don Diego et Mono, avec deux visions incompatibles de la Colombie, un constat sur les causes de la violence qui ravage encore aujourd’hui ce pays inégalitaire.

A Peine j'ouvre les yeux (Leyla BOUZID)

note: 3Jeunesse tunisienne Laëtitia - 2 juin 2016

«Quand je vois ce monde de portes fermées, je m’enivre et ferme les yeux.
A peine j’ouvre les yeux, je vois des gens privés de travail, de bouffe, et d’une vie hors de leur quartier.
A peine j’ouvre les yeux, je vois des gens qui s’exilent, traversant l’immensité de la mer, en pèlerinage vers la mort».

Farah, jeune électron libre et leader d’un groupe de rock engagé, chante avec fougue des textes appelant à changer l'état des choses, à libérer son pays de la chape de plomb instaurée sous le régime de Ben Ali. Pour autant, le propos de la réalisatrice n’est pas d’en faire une égérie révolutionnaire, mais de mettre en avant le désarroi de cet élan de vie conscient de sa force (la jeunesse tunisienne), mais qui n'a pas encore été canalisé et qui sera un des puissants leviers de l’avènement du Printemps arabe.
Ce qui fait la force du film de Leyla Bouzid, c’est qu’elle filme avec acuité ce qu’elle a vécu et subi : le quotidien étouffant fait d’interdits, de contrôle social (le regard du voisinage, la crainte du déshonneur), les pleins pouvoirs d’une police corrompue avec ses indics infiltrant tout groupe militant pour mieux les surveiller et sévir. Mais aussi ce qui rend belle la vie à Tunis pour Farah et ses amis : l’ambiance survoltée des concerts comme l’intimité des cafés où l’on ose boire de l’alcool et chanter avec les marginaux, les oubliés du progrès.
Autre atout du film, son énergie communicative, qui découle en grande partie de la musique de l'Irakien Khyam Allami, subtil mélange de musique populaire tunisienne et de rock électrique, qui donne envie de danser et de célébrer la vie.

Le Grand livre des philosophes (Robert ZIMMER)

note: 3“Le chat n’est pas tenu de vivre selon les lois du lion.”Anonyme - 28 mai 2016

Kant, Platon, Machiavel, Nietzsche…Non ne tremblez pas à ces noms amis lycéens qui allez passer le bac philo sous peu ! Ne tressaillez plus anciens bacheliers honteux de ne plus vous rappeler de ce que disait Zarathoustra quand il parlait ainsi !
Ce livre hautement pédagogique décrypte les philosophes par l’étude d’un texte majeur.
Sincèrement, ça reste de la philosophie pas un guide pratique « culture générale pour les nuls sans effort en 15 secondes par jour avec supplément des abdos en béton sans bouger de son canapé »…Non, il faut tout de même rester mobilisé lors de la lecture, mais c’est réellement bien conçu pour appréhender chaque philosophe et sa pensée. Parfait pour consolider sa culture générale sans risque traumatique (ceci intéressera aussi ceux qui passent des concours).
Soit dit en passant, best-seller en Allemagne, entre "Kinder sind was Wunderbares" de Johann König et "Vom Inder, der mit dem Fahrrad bis nach Schweden fuhr" de Per J. Andersson…Ne m’en demandez pas plus !
Ah, pour finir, qui est l'auteur du titre de cette chronique ?
Réponse
A) Allain Patrice Bougrain-Dubourg
B) Rudyard Kipling
C) Baruch Spinoza
D) la bibliothécaire
Vous pouvez donner votre réponse à l'accueil de la médiathèque ou la glisser dans la boîte aux lettres pour les moins téméraires !

La Femme sur l'escalier (Bernhard SCHLINK)

note: 3Femme fatale Laëtitia - 25 mai 2016

Voici un roman tout en contraste qui part d’un tableau, une huile sur toile de Gerhard Richter Ema, intitulé aussi «La Femme sur l’escalier». L’auteur s’en est inspiré pour son personnage principal, Irène, jeune-femme blonde à la beauté solaire qui va cristalliser toutes les passions. A la base, un jeune et brillant avocat, le narrateur, doit traiter un cas bien étrange : un riche industriel, Gundlach, achète un portrait, un nu représentant sa femme Irène à un peintre encore inconnu, Schwind, dont elle est à la fois la muse et l’amante. L’un veut récupérer son tableau, l’autre sa femme, l’avocat, naïf et amoureux, propose à la femme fatale de duper les deux goujats et de fuir avec lui en emportant le tableau, et bien sûr sera trahi.
Trente ans plus tard, lors d’une mission en Australie, le narrateur tombe en arrêt sur ce même tableau à l’Art Gallery, qui fait remonter les souvenirs enfouis. Il mène l’enquête et va retrouver sur une île perdue Irène, certes vieillie mais toujours mystérieuse. L’essentiel réside à la fois dans ces tardives retrouvailles, avec les thèmes chers à l’auteur : les trajectoires de vie avec sa part de bifurcations, d’erreurs, de regrets, et le personnage du narrateur très fouillé dans ses questionnements existentiels. Malheureusement, j’ai été moins séduite par les autres personnages, assez clichés, et j’aurais aimé que le passé d’Irène en RDA (terroriste des Fractions armées rouges ? simple militante ?) soit davantage creusé.
Néanmoins un bon roman avec une écriture toute en délicatesse.

La quête d'Ewilan Ellana (BD) n° 1
Enfance (LYLIAN)

note: 2...Anonyme - 20 mai 2016

Ellana : un des personnages clés de Pierre Bottero dans sa première trilogie fantastique « La quête d’Ewilan », si brillamment construit et si finement étudié qu’il en éclipserait presque les autres protagonistes, aux personnalités pourtant bien marquées.
Fort de ce constat, Pierre Bottero, du temps de son vivant, lui a donc accordé une trilogie entière (« Le Pacte des Marchombres »), permettant à Ellana de prendre son envol.

Et quel envol !
Beauté, force, puissance, prouesses physique dans un récit initiatique qui suit l’enfance d’Ellana, sa découverte du monde des Marchombres, sa volonté de s’engager sur cette Voie, son apprentissage et les aventures qui s’ensuivent.

Impossible de lire ces romans sans ressortir transformé et avoir envie à son tour de devenir Marchombre.

Ce qui nous fait revenir à l’adaptation en BD. Après celle, plus ou moins réussie de « La Quête d’Ewilan », il paraissait évident qu’Ellana n’y couperait pas. Et enfin, après s’être rongé les ongles (et la table et les chaises aussi) en se demandant à quelle sauce Ellana allait être graphiquement mangée, voilà le premier tome.

Et alors ? L’adaptation est-elle à la hauteur du roman?

Et bien malheureusement non, mais il fallait s’y attendre. Comment retraduire en quelques pages toute la complexité de ce personnage dans un roman où chaque mot est à sa place et nous fait en apprendre un peu plus sur lui et son univers ?

Car la BD passe à côté de bien des éléments qui font la magie du roman : l’évolution psychologique d’Ellana (pas assez développée dans la BD), son caractère bien trempé (pas assez marqué dans la BD), les personnages secondaires qui ne sont ici qu’esquissés et qui pourtant participent activement à la construction d’Ellana dans le roman…

La BD a fait le choix de couper le 1er tome en deux afin de s’attarder sur davantage de détails, mais cela ne suffit pas. Certaines scènes qui nous paraissaient essentielles dans la mise en valeur des personnages principaux sont malgré tout coupées et la relation entre Sayanel et Ellana, pourtant clé dans sa découverte du monde des Marchombres, n’est là qu’à l’état d’ébauche. Dommage.

Un avis plutôt négatif qui est cependant à nuancer : un lecteur ne connaissant pas les romans et ne pouvant effectuer de comparatif passera sans doute un très bon moment. Le scénario est étudié de façon à permettre la compréhension de l’intrigue sans avoir lu les livres, le dessin est beau et dynamique, les couleurs sont vives et bien appliquées et Ellana ressemble peu ou prou à l’idée que l’on pourrait s’en faire d’après les descriptions de son physique dans le roman.

En conclusion : si vous avez dévoré la trilogie de Bottero, essayez de ne pas comparer la BD avec les livres et faites comme ceux qui ne les ont pas lus (et qui feraient bien de les lire) : laissez-vous porter par l’histoire (sans trop vous poser de questions) et vous passerez un agréable moment.

Avec ou sans toi (Donna FREITAS)

note: 4... Pauline - 20 mai 2016

Jane perd son père, policier, dans un cambriolage qui a mal tourné. Traumatisée par cet événement, elle décide de réapprendre à vivre, profiter des vacances, de ses copines, de la plage, du soleil… Elle rencontre Handel, LE mauvais garçon de la ville qui se révèle n’être pas si mauvais que cela… Une idylle nait entre nos deux personnages. Jane va mieux, l’amour l’aide à sortir la tête de l’eau, jusqu’au jour où une terrible révélation vient briser ce début de bonheur. Toutes vérités sont-elles bonnes à savoir ? Et vous, qu’auriez-vous fait à la place de Jane ?
Une histoire romantique (Jane et Handel), sur base de faits dramatiques (le cambriolage…), le tout agrémenté d’humour et de légèreté (les amies de Jane), un très beau roman à lire sans modération !

O vous, frères humains (Adriano LUZ)

note: 3"Ne voyez-vous pas que je vous aime ? Ne voyez-vous pas que je vais en mourir ?"A.CohenAnonyme - 19 mai 2016

Le choc de l’insulte, l’incompréhension, l’humiliation, les larmes, puis la rumination…
La scène se rejoue sans cesse dans la tête de la victime, puisque c’est injuste, absurde, rien ne justifie. Mais l’homme cherche inlassablement une explication qu’il ne peut obtenir.
L'après coup. Le jour d'après. A partir de là, plus jamais rien ne sera pareil. L'insouciance est perdue, l'enfance est passée.
La violence des insultes proférées à l’encontre d'un enfant, déforme irrémédiablement la perception de son environnement et bien-entendu de sa propre image.
L'enfant disloqué, tordu de douleurs, c'est Albert Cohen, à Marseille en 1905. Le dessin tout en distorsions, c'est Luz, rescapé de l'attentat contre Charlie Hebdo à Paris en 2015.
Je ne suis pas entrée facilement dans cet album, encore une adaptation, un sujet difficile…. Malgré tout, j'en sors bouleversée.
Non, ce n'est pas du déjà vu, oui, il ne faut pas cesser de s'interroger.

La Malédiction des templiers (Raymond KHOURY)

note: 3... Laëtitia - 13 mai 2016

Sur un parchemin craquelé du XIVe siècle, tracés à la plume d’oie, ces quelques mots : «Le chevalier Conrad et ses frères templiers … traversent le pays, chargés de l’œuvre du démon, rédigée de sa main à l’aide d’un poison tiré des tréfonds de l’enfer, et dont l’existence maudite pourrait ébranler le socle même sur lequel a été érigé notre monde». Des siècles plus tard, le tandem constitué de Sean Reilly, agent du FBI, et de Tess Chaykin, archéologue reconvertie en romancière spécialiste des Templiers, cherche sans relâche ce trésor, concurrencé par un agent iranien qui sème la mort autour de lui. Du Vatican à la Turquie, des archives secrètes de l’Inquisition conservées au Saint-Siège aux paysages lunaires de Cappadoce avec ses cheminées de fées, le lecteur se laisse emporter dans une course-poursuite effrénée. Un bon divertissement, qui n’exclut pas une réflexion philosophique sur le rôle des religions dans l’évolution de l’humanité, notamment sur les distorsions apportées aux textes fondateurs dans le but d’une manipulation politique.

Une Etoile tranquille (Pietro SCARNERA)

note: 3...Anonyme - 4 mai 2016

Si c’est un homme est l’un des principaux témoignages de la shoah.
Traduit sur tous les continents, lu dans les écoles…
Néanmoins, Primo Levi, lui, demeure un mystère.
Homme discret, il s’est assez peu dévoilé dans les médias. Pietro Scarnera s’attache à restituer l’ensemble des indices semés par l’écrivain pour éclairer la biographie d’un homme multiple.
Rescapé des camps, écrivain-témoin de la guerre mais pas seulement.
Primo Levi est aussi chimiste de profession, poète, auteur de nouvelles SF, mari et père.
Une vie dense. Des journées au rythme du quotidien de père de famille, cadre d’usine, des nuits de création littéraire.
Turin en toile de fond et personnage secondaire, berceau de Primo Levi et de Pietro Scarnera.

Portrait sentimental est un sous-titre qui sonne juste. Tendre, admiratif, respectueux, l’auteur interroge sans inférer le sens de la vie de celui qui témoigna sans juger.

Défaite des maîtres et possesseurs (Vincent MESSAGE)

note: 5Un très grand roman Laëtitia - 3 mai 2016

Imaginez : dans un futur indéterminé, notre planète Terre est devenue un monde aux ressources limitées et à la démographie strictement encadrée, suite aux comportements irresponsables humains (gaspillage des ressources énergétiques, surconsommation). L’homme n’est plus l’espèce dominante, tous les pouvoirs se retrouvant entre les mains d’extra-terrestres qui ont divisé l’espèce humaine en trois catégories : les hommes (et femmes) ouvriers, esclaves d’un néo-capitalisme, les hommes de compagnie (comme nos chiens et chats) et enfin les hommes d’élevage, destinés à être transformés en viande.
Le narrateur, Malo, extra-terrestre, fait partie d’une minorité à s’insurger contre le sort réservé à l’homme, des années de travail à l’inspection des élevages et abattoirs ainsi que son attachement pour Iris, une humaine, l’ayant radicalement transformé et conduit à la conclusion «nous nous trompons».
Nous ne dévoilerons pas davantage l’intrigue afin de ne pas gâcher sa montée en puissance, sachez juste que vous avez là une dystopie qui non seulement vous tiendra en haleine, mais qui soulèvent des questionnements philosophiques, éthiques, politiques sur des problématiques urgemment contemporaines. Et qui convaincra peut-être certains lecteurs à devenir végétariens ou en tout cas à consommer de la viande avec davantage de modération.

Les Cowboys (Thomas BIDEGAIN)

note: 3Le nouveau westernAnonyme - 30 avril 2016

Genre : western
Epoque : contemporaine, de la décennie pré 11 septembre jusqu’aux attentats de Madrid
Nationalité : française
Décors : des grands espaces de l’espace Schengen jusqu’aux plateaux arides du Pakistan
Protagonistes :
Les cow-boy : Le père, solide pilier d’une famille rurale passionnée de country. Kid, fils loyal et frère silencieux.
Mais alors, ne manquent plus que les indiens ! Ceux que l’on redoute, ce symbole de l’autre qui fait peur.
Les indiens en France, ne seraient-ce pas les musulmans ?
Un film original pour évoquer plusieurs thèmes actuels : la déliquescence de la famille lorsque l’enfant devient adolescent, le radicalisme religieux, la construction d’une société multiculturelle.
François Damiens est admirable en John Wayne, infatigable écorché. Et que dire de Finnegan Oldfield ? Tout en nerfs et en silence.
Film inattendu, joli moment.

Une aventure des spectaculaires n° 1
Le cabaret des ombres (Régis HAUTIERE)

note: 3...Anonyme - 16 avril 2016

Que se passe-t-il lorsqu’une bande d’artistes de cabaret complètement à côté de la plaque rencontre un inventeur farfelu et amnésique à ses heures perdues, qui leur offre l’opportunité de sauver le monde ?

Une aventure complètement loufoque, des rebondissements surprises et des gags à la pelle : rien ne se passe comme prévu. On en vient même à se demander en milieu de BD si, dans leur ardeur de vouloir bien faire, cette bande de super-héros du dimanche n’en viendraient pas plutôt à déclencher la fin du monde au lieu de le sauver.

Ce qui est certain, c’est que la ville de Paris ne sortira pas indemne de cette aventure.

De l’action, beaucoup d’humour, des personnages à la limite du caricatural portés par un dessin efficace et un scénario déjanté : c’est sûr, les Spectaculaires n’ont pas fini de nous étonner et surtout de nous faire rire.
On attend la suite avec une pointe d’impatience et on en rigole d’avance.

The Lobster (Yorgos LANTHIMOS)

note: 3Cinéma grec Laëtitia - 14 avril 2016

La scène d’ouverture du film s’apparente à un entretien administratif : inscription à Pôle Emploi, admission à l’hôpital ? Le spectateur comprend vite que le héros, David (Colin Farrell méconnaissable) vient d’être admis dans un centre d’internement destiné aux célibataires. Car dans un futur proche, le célibat n’est plus toléré, et David a 45 jours pour trouver l’âme sœur. Passé ce délai, il sera condamné à être transformé en animal de son choix, en l’occurrence en homard (d’où le titre du film). Comme ses compagnons d’infortune, David tentera de gagner un sursis en participant à la chasse aux «solitaires», marginaux ayant renoncé à l’amour, vivant dans les bois, inspirés des résistants de «Fahrenheit 451» de Truffaut.
La première partie du film, avec la découverte de tous ses règlements loufoques, est un petit bijou d’humour grinçant et de situations absurdes, la seconde partie (dès que l’on bascule chez les «solitaires») s’essouffle un peu.
Néanmoins, quel bonheur pour ma part de découvrir un jeune cinéaste grec aussi inventif, original, qui questionne notre rapport à l’amour, au couple dans une société totalitaire certes futuriste, mais qui pourrait devenir la nôtre avec ces injonctions toujours plus pressantes au bonheur.

Papa est connecté (Philippe DE KEMMETER)

note: 3Attention papa addict! Régine - 14 avril 2016

Accroché à son ordinateur du matin au soir ce papa pingouin ne trouve plus le temps pour jouer avec son fils ; de plus, il oublie tout et délaisse maman pingouin...Heureusement la technique ayant ses limites et la vie réservant des surprises, cette histoire connaîtra un dénouement drôle et inattendu !

Nous trois ou rien (KHEIRON)

note: 3fantaisie socialeAnonyme - 13 avril 2016

Qu’est-ce qui est commun aux artistes Sattouf, Satrapi et Kheiron ? L’Orient des origines, l’exil, l’humour…et certaines blessures sous la dérision.
Cette biographie familiale de l’exil d’Iran à la banlieue parisienne prend parfois des accents de Riad Sattouf, lorsque c’est drôle même quand ça ne devrait pas du tout l’être.
On peut aussi y retrouver du Marjane Satrapi dans la manière sensible et insolente de traiter l’Iran, les personnages qu’elle croise et ses propres mésaventures.
Enfin, la propre sensibilité du réalisateur, scénariste, comédien, Kheiron (Nouchi Tabib de son vrai nom), qui raconte là son histoire mais surtout celle de ses parents, fier et définitivement positif.
On pourra lui reprocher le délicat exercice du contrepied dans la première partie du film en Iran ou un certain angélisme dans la deuxième partie dans la Cité des poètes, mais on ne peut lui enlever de réelles qualités de conteur.

Des Larmes sous la pluie n° 2
Le Poids du coeur (Rosa MONTERO)

note: 4Dystopie noire Laëtitia - 13 avril 2016

Après «Des larmes sous la pluie» qui marquait l’incursion de l’auteur espagnole dans le domaine de la SF, voici une nouvelle enquête (qui peut se lire indépendamment) de Bruna Husky, androïde dite réplicante (hommage à Philip K. Dick) qui vit aux Etats-Unis de la Terre, au XXIIe siècle. Son enquête la mène d’abord en Zone zéro, où l’air est extrêmement pollué et où vivent les pauvres qui ne peuvent se payer des résidences où l’air pur est tarifé. Elle prend sous son aile une enfant sauvage, Gabi, et de retour chez elle s’aperçoit que Gabi a été contaminée par une forte dose de radioactivité ; hors depuis 2059 l’énergie nucléaire est interdite …
Flanqué d’un tactile et d’une réplicante (son clone en plus jeune), elle se rend en mission au royaume de Labari, île spatiale dominée par un système de castes, et aux confins de la Finlande ravagée par une guerre permanente, soupçonnant un trafic de déchets nucléaires.
Outre son don pour construire des mondes dystopiques cohérents et extrêmes, l’auteur réussit son pari en faisant de Bruna un androïde plus qu’humain car non dénué de questionnement existentiel et nous livre un thriller écologique et politique d’anticipation. Car Onkalo est bel et bien un projet de site d’enfouissement prévu pour stocker des déchets nucléaires dès 2020. Cela laisse songeur sur le legs aux générations futures…

Zaï zaï zaï zaï (FABCARO)

note: 4Tout est dans le titre !Anonyme - 9 avril 2016

Titre intriguant, musical, claquant, parfait pour une BD rocambolesque.
Extravagante, mais pas insensée.
Derrière l'histoire délirante un vrai questionnement sur l'acceptation de la différence doublé d’une satire des médias.
Combien de fois par an vous arrive-t-il de rire à haute voix en lisant un livre ? J'avoue, pas souvent. Soit la littérature n'est pas extrêmement joviale ces temps-ci, soit j'ai un sens de l'humour très limité… En tout cas, où que se place le curseur entre les deux éventualités, cette BD déjantée m’a vraiment fait rire ! Le plus fort, c’est que maniant l’absurde avec subtilité, cette BD brille autant par son humour que son intelligence.

François le Petit (Patrick RAMBAUD)

note: 3Merci pour ce moment Laëtitia - 8 avril 2016

Savoureuse, caustique, grinçante, hilarante, telle est tour à tour la plume bien aiguisée de P. Rambaud, qui après nous avoir enchantés avec ses chroniques du règne de Nicolas Ier, récidive avec «François le Petit». Si Nicolas Sarkozy, alias «Nicolas-le-mauvais», «l’ulcéré», hante encore ses pages avec ses spadassins, l’abbé Buisson, le duc de Sablé et consorts, si Melle de Montretout (Marine le Pen) fait une apparition, bref si tous les bords politiques sont égratignés, François IV et sa cour tiennent le haut du pavé. La peinture du quinquennat actuel, les intrigues de cour, nous offrent une savoureuse galerie de portraits : la marquise de Pompatweet (l’ex-première dame), le colérique duc d’Évry (Manuel Valls), le connétable de Montebourg sont autant de personnages pittoresques, truculents, qui gravitent dans la galaxie présidentielle. Mais les faits marquants du quinquennat sont aussi passés à la moulinette impitoyable de l’auteur : le mariage pour tous, l’affaire Cahuzac, et pour ma part mon préféré au traitement satirique hautement réussi le duel Montebourg versus Mittal concernant les hauts-fourneaux de Florange. Dans une société qui se délite, qu’il est bon de rire des ridicules et des mésaventures des «grands( ?)» de ce monde !

Nous, quand on sera grands (Jean LEROY)

note: 4La jeunesse du grand méchant loup ou les raisons de cette étrange manie de vouloir tout dévorerAnonyme - 5 avril 2016

Le petit chaperon rouge et les trois petits cochons, encore enfants, jouent dans le bac à sable. Bien évidemment, le loup est au centre de la discussion et chacun y met de son grain de sel pour décider de ce qu’ils lui feront plus tard quand ils seront grands.

Pompier pour éclabousser le loup avec la lance à incendie, fermier pour piquer les fesses du loup avec une fourche, magicien pour faire disparaitre le loup… des métiers imaginatifs qui lui en font voir de toutes les couleurs.

Tout le monde rigole bien, jusqu’au moment où tous ces projets font pleurer le pauvre petit loup qui n’avait jusque-là rien demandé à personne.

Un album à la fois drôle et touchant qui détermine l’avenir du loup, pour une fois bien à plaindre.

Et on comprend enfin pourquoi, après toutes ces années sur les bancs de l’école avec un petit chaperon rouge et des petits cochons qui échafaudent mille complots contre lui, le loup en arrive à perdre patience et à devenir le grand méchant que l’on connait bien.

Un Certain Cervantès (LAX)

note: 3Road trip épiqueAnonyme - 2 avril 2016

Miguel de Cervantes et Mike Cervantes en cavale sur les routes poussiéreuses de l'ouest dans une Ford mustang. Voilà une image qui donne le ton de cette épopée de la révolte. Mike cumule les ressemblances avec son illustre homonyme : un bras perdu au combat, une longue captivité dans les geôles ennemies, un impossible retour au monde. Révolte viscérale contre les inégalités sociales, les dégâts de l’ultralibéralisme, la censure dissimulée… Une BD belle et inutile, comme un coup d’épée dans l’eau, un combat contre un moulin à vent ?

La Fille du train (Paula HAWKINS)

note: 2Parfait dans le TER (ça marche aussi dans le bateau !)Anonyme - 22 mars 2016

Lu dans un train (et si si), de là à le cataloguer dans les romans de gare…Pourquoi pas en fait ? Et si ce best-seller était un bon roman noir destiné à divertir sans plus d’ambition littéraire ?
Indéniables qualités : l’ingénieux point de vue de la passagère du train nous entraine rapidement dans le récit, porté par une écriture directe, efficace.
Principal défaut : avoir été tellement gonflé par des critiques dithyrambiques qu’il en déçoit fatalement par sa modestie. L’intriguant point de départ ne tient pas ses promesses dans le développement et les personnages, inégalement travaillés, manquent pour certains de relief voire de crédibilité.
Adapté par Spielberg (oui oui, il paraît que ce serait envisageable!) il a les qualités pour devenir un scénario de blockbuster après avoir été un best-seller !

Je Suis cathare n° 1-4 (MAKYO)

note: 3... Laëtitia - 22 mars 2016

Après avoir adapté en BD les romans ésotériques d’Éliette Abécassis, Pierre Makyo creuse la même veine en nous livrant une nouvelle série (après «Balade au bout du monde») sur les Cathares. Cette BD a le double mérite de faire découvrir aux non-initiés cette doctrine dissidente du catholicisme, tout en plongeant le lecteur dans un récit d’aventures teinté de fantastique. Végétariens, croyant en la réincarnation, prônant des valeurs humaines, les Cathares, principalement concentrés en Occitanie, subissent la persécution de l’Église. De manière schématique, c’est l’histoire de deux frères en conflit, Guilhem Roché, un «Parfait» (Cathare initié) qui s’ignore, car frappé d’amnésie, et d’Arnaut, qui servira l’Inquisition pour se venger de son frère, par dépit amoureux. Guilhem est hanté par un songe où il se voit combattre un chevalier d’ombre et un faucon s’envoler vers une intense clarté. Se découvrant des pouvoirs de guérisseur, la mémoire lui revenant en partie, Guilhem n’a de cesse de rassembler ses souvenirs épars et par-là même de mettre à jour des secrets sur la confrérie. Le trait fin, détaillé, l’éclairage de visages extatiques, bref l’art du dessinateur Calore est aussi une valeur ajoutée à cette sympathique série.

Le second quatuor de Los Angeles n° 1
Perfidia (James ELLROY)

note: 4... Laëtitia - 16 mars 2016

Pour ceux qui ont lu Ellroy, «Perfidia» est le premier opus d’une nouvelle tétralogie intitulée «Le second quatuor de Los Angeles», sorte de «prequel» au «Quatuor de Los Angeles», réintroduisant ici certains de ses personnages les plus emblématiques en plus jeunes. Et pour ceux qui ne connaissent pas l’auteur, celui-ci va vous immerger dans les bas-fonds de sa ville natale, à la veille de l’attaque de Pearl Harbor, dans un climat de guerre et évoquant –ce qui est rare dans la littérature américaine et qui donc a le mérite d’être souligné- la trahison morale du pays vis-à-vis de ses concitoyens d’origine japonaise, internés dans des camps. Ce roman noir commence avec l’assassinat d’une famille de japonais, les Watanabe, et une enquête de terrain (indices, planques, indics) menée par un trio de policiers haut en couleur : William H. Parker, personnage ayant réellement existé, policier intègre qui a lutté contre la corruption au sein même du LAPD, et deux personnages de fiction, Dudley Smith, ripou opiomane et Hideo Ashida, nisei écartelé entre son désir de faire ses preuves en tant que policier de la scientifique et protéger sa famille de la répression. La guerre favorisant l’amoralisme, le lecteur va être emporté dans un maëlstrom d’intrigues proliférant telles des cellules cancéreuses, plongeant dans les microsociétés de Los Angeles : gangs ethniques, factions nazies, eugénistes, starlettes de cinéma vendant leurs charmes dans l’espoir de décrocher le rôle de leur vie, policiers corrompus, pornographes. On se laisse prendre au jeu, progressant dans l’élucidation de l’intrigue et comprenant mieux cette société trouble et multiple grâce à l’alternance des regards contradictoires, des monologues et témoignages mêlés. Et on attend avec impatience la suite!

Marcel Proust à Evian (Jean-Michel HENNY)

note: 3...Anonyme - 11 mars 2016

Suivre Marcel Proust à Evian, c'est pénétrer dans le cercle de la famille Brancovan et rencontrer Anna de Noailles, séjourner au "Splendide" palace disparu, se passionner pour l'affaire Dreyfus, sentir s'esquisser les contours de la "Recherche du temps perdu", s'égarer quelques heures dans la cité thermale à la belle époque.
Ce livre est aussi un bel objet, riche d'une iconographie rare.

Une Colère noire (Ta-Nehisi COATES)

note: 4...Anonyme - 10 mars 2016

Vous voulez lire le livre de chevet des américains, Barack Obama compris, l'été dernier ? Ouvert par simple curiosité, refermé sous le choc. Colère noire est une lettre de 200 pages d’un père à son fils de 15 ans. Ta-Nehisi COATES, journaliste noir-américain, confie à son fils une version des fondements et du fonctionnement de la société hors constitution américaine et hors manuels scolaires. Par le prisme de l’histoire de leurs aïeuls esclaves, de sa propre enfance à Baltimore et des faits divers quotidiens aux noms d’adolescents noirs tués et de policiers blancs acquittés…Sidérant. Il est difficile d’imaginer d’avoir peur pour sa vie chaque jour dans un pays en paix. Il est quasi inconcevable pour moi, citoyenne européenne de type caucasien, d’imaginer qu’un parent puisse trembler chaque jour pour la vie de son enfant dans une démocratie… Et pas n’importe laquelle, celle qui s’exporte face aux démocraties balbutiantes comme le modèle à suivre, celle qui s’impose aux dictateurs par les armes ! La violence des propos de Coates est double, dans les faits qu’il décrit et dans l’ignorance que l’on en a en face, autour.
Et pour couronner le tout, dans ce pays usine à rêve, qui en respire, en produit, en consomme, Coates lui, n’en vend pas…Il refuse d’engourdir la vigilance de son fils avec de faux espoirs…
Malgré tout, et comme il m’est indispensable pour avancer de garder confiance, ne peut-on pas considérer le fait de rendre cette lettre publique en la publiant, comme un acte d’espérance ?

Crans-Montana (Monica SABOLO)

note: 2Attention, piste dangereuseAnonyme - 19 février 2016

Monica Sabolo livre un roman nostalgique sur l’adolescence dorée des familles les plus fortunées d’Europe dans les années 60-70, avachie dans les transats à fourrure du bord des pistes de ski et des boites de nuits de la station de Crans-Montana, Suisse… La vie rêvée des anges commence pourtant bien, comme le roman. Les contours des personnages intriguent, les descriptions du biotope captivent le lecteur, comme entré par effraction dans un club privé sans la carte de membre.
Ambiance adolescence classique : trilogie de belles filles aguicheuses sans le vouloir face au groupe de garçons maladroits. Relations ambigües, malaise, transformations physiques, fêtes… Mais avec un petit quelque chose en plus, peut-être la conscience de l’appartenance au milieu des puissants 10% qui possèdent 90% de la richesse mondiale, rend la comédie de la chrysalide plus piquante, moins tragi-comique.
Puis mollement, on tombe dans le trop attendu « maman picole trop de champagne parce qu’elle a pas pu épouser celui qu’elle aimait…" Je ne dévoile pas tout pour ceux qui souhaiteraient passer le cap des 100 pages. Dommage, on commençait à se sentir bien dans le récit. Que s’est-il passé ? Les protagonistes perdent toute substance, s’évaporent, on n'y croit plus...

La Isla minima (Alberto RODRÍGUEZ)

note: 3...Anonyme - 19 février 2016

Espagne post-franquiste, un duo de flics de prime abord "bad cop good cop", est envoyé depuis Séville pour enquêter dans la région rurale du delta du Guadalquivir. Ambiance western pour un polar dont l’intrigue meurtrière peu originale (meurtres de jeunes filles désemparées, à l’heure des premiers émois amoureux et des rêves d’avenir meilleur) est matière à explorer le monstre dans l’homme. En temps de guerre comme en temps de paix, chez le paysan comme chez le propriétaire terrien, de l’adolescent plein de sève au vieux libidineux, homme ou femme... La violence est contenue mais omniprésente. Pas de manichéisme dans ce film très bien servi par les comédiens impeccables et un décor loin des clichés d’une Andalousie de castagnette.

Zoo (James PATTERSON)

note: 3... Laëtitia - 13 février 2016

Si vous recherchez une intrigue strictement policière, lecteur, passez votre chemin. Mais si vous aimez les thrillers d’anticipation apocalyptique à la Michaël Crichton, avec de l’action, des scientifiques qui tentent de sauver le monde, «Zoo» va vous faire passer un bon moment. On suit avec délice les aventures de Jackson Oz, étudiant en biologie dont la thèse a pour thème le CHA, c’est-à-dire le conflit humano-animal. Décrié par de nombreux confrères, il s’obstine à développer sa théorie de mutation du comportement animal, fruit de perturbations écologiques, jusqu’à ce que l’actualité finisse par lui donner raison : sur tous les continents, les animaux s’organisent en meutes et agressent violemment un seul mammifère, l’homme. Envoyé dans le delta de l’Okavango, il assiste à une attaque anormale de lions (uniquement des mâles) qu’il filmera, sauve des crocs des alligators Chloé, jeune scientifique venue étudier la mutation des oiseaux migrateurs et finit par rejoindre les Etats-Unis. Enfin pris au sérieux, entouré de scientifiques et épaulé par la NSA, Jackson Oz et Chloé vont se livrer à une course contre la montre pour comprendre les causes du phénomène, trouver des solutions et tenter de faire en sorte que la prochaine grande extinction ne soit pas celle de l’homo sapiens…

7 secondes (Tom EASTON)

note: 4... Pauline - 6 février 2016

7 secondes, c’est le temps dont dispose Mila pour échapper aux agents à ses trousses. 7 secondes de décalage entre la réalité et la retransmission du téléphone. C’est une véritable chasse à l’homme (à la femme) qui est organisée. Les courses poursuites s’enchaînent, les scènes d’action sont époustouflantes, on vit à 100 à l'heure cette aventure avec Mila. La plume de l'auteur nous entraine très facilement dans son monde, les pages défilent à une vitesse folle ! Un livre haletant qu'il faut découvrir sans attendre !

A silent voice n° 1 (Yoshitoki OIMA)

note: 5...Anonyme - 4 février 2016

A Silent Voice ? Un manga phénomène traitant de la surdité et du handicap qui a littéralement bouleversé le Japon et qui est bien parti pour renouveler son exploit en France.

Sélectionné au festival d’Angoulême, ce petit bijou est une boule d’émotion à l’état pur.

L’histoire : Shoko, une jeune fille sourde, est transférée dans une nouvelle école. Le leader de la classe, Shoya, intrigué, fasciné, puis exaspéré par cette jeune fille avec qui personne n’arrive à communiquer, va lui rendre la vie impossible, riant avec le reste de la classe des déboires et des persécutions qu’il fait subir à Shoko. Jusqu’au jour où il va trop loin.
La situation se retourne alors contre lui et les rôles s’inversent.

La force du groupe qui se coalise contre soi, la mise à l'écart par le reste de la société, l’enfer de la solitude : tout ce que Shoya avait fait subir à cette fille, ça va être à son tour de l’expérimenter.

Des années plus tard, il décide de retrouver Shoko…

Un manga étonnant, bouleversant, déstabilisant, qui réussit à parler du handicap, de la surdité et de l’intimidation scolaire avec autant de tact que de finesse. Le scenario est impeccable et l’évolution psychologique des différents protagonistes tout au long du manga est parfaitement maitrisée. Les réactions des personnages et leur façon de penser nous parlent, nous interpellent, on les comprend, on ressent leurs joies, leurs peines, leur détresse, on les aime, on les déteste, on les accepte, on les apprécie… Ce manga captivant nous fait passer par toute une palette d’émotions avec une aisance et un brio absolument exceptionnel. Et on ne s’en lasse pas !

A Silent Voice, c’est une véritable pépite émotionnelle à lire absolument et qui donnera sans doute envie à bien des lecteurs de se lancer dans la langue des signes !

Coeur tambour (Scholastique MUKASONGA)

note: 4... Laëtitia - 28 janvier 2016

Scholastique Mukasonga a été révélée au grand public par le prix Renaudot 2012 pour «Notre-Dame du Nil», livre évoquant certes les prémices du génocide rwandais, mais dans lequel elle déploie tout son art de conteuse pour en faire une ode puissante et poétique, non misérabiliste, de son pays aux mille collines. Elle revient enchanter cette rentrée littéraire 2016 avec un roman singulier, «Cœur tambour». L’idée du livre germe lors d’un festival de tambours en Guadeloupe, où un tambouyé lui parle de Nyabinghi, princesse qui serait morte en se rebellant contre l’esclavage et le colonialisme au milieu du XIXe siècle, et qui a aussi donné son nom aux percussions rituelles en Jamaïque et au mouvement rastafari. L’auteur se documente alors sur les différents tambours usités aux Caraïbes, au Rwanda et en Amérique, sur leurs légendes et leurs attributs. Elle romance et réécrit l’histoire de Kitami, chanteuse se livrant sur scène à des transes, comme possédée par l’esprit de Nyabinghi. Nous suivons sa trajectoire, depuis sa jeunesse au Rwanda, sa rencontre avec une femme possédée par la déesse, qui lui révèle sa destinée : «Nyabinghi c’est l’esprit de Kitami, et Nyabinghi c’est Muhumuza, mais Muhumuza ce n’est pas un esprit, c’était une femme comme toi et moi, mais c’était aussi une reine remplie de l’esprit de Nyabinghi… Quand elle est arrivée au Mpororo, elle disait qu’elle savait qu’un tambour était caché dans une grotte et que, si l’on entendait battre ce tambour, un troupeau de vaches sans fin sortirait du flanc de la montagne : l’abondance régnerait à jamais alors sur le Mpororo. Muhumuza, je l’ai connue, … elle était prisonnière des Abongereza, des Anglais, ils n’avaient pas capturé son tambour, il est toujours là, caché quelque part, qui le retrouvera ? Ce sera peut-être toi, ou une autre, car Nyabinghi ne meurt jamais». On se plonge avec délice au coeur des racines de l’Afrique et de la négritude.

La dame de Damas (Jean-Pierre FILIU)

note: 3...Anonyme - 27 janvier 2016

Overdose d’images choc aux sous-titres stéréotypés pour donner à voir une guerre sans l'expliquer. Bien-entendu, ce n’est pas la vision journalistique de Jean-pierre Filiu, historien, professeur à Sciences-Po spécialiste du Moyen-Orient. Auteur du remarquable « Les Meilleurs ennemis », BD documentaire d’utilité publique pour comprendre les relations Etats-Unis/Moyen-Orient mais aussi de la BD "Le printemps arabe". Il opte cette fois pour une fiction. Choix surprenant mais intéressant dans cette tentative d’expliquer les origines du conflit et les implications complexes des différents intervenants, qu’ils soient ouvertement belligérants ou hypocrites représentants de la paix.
Complexe, c’est le moins qu’on puisse dire, en tout cas ni manichéen, ni évident et malgré toute la pédagogie de l’auteur, l’histoire reste dense, les méandres parfois difficiles à suivre…
L’histoire d’amour impossible sur laquelle s’appuie la trame narrative, ajoute assurément une forte dose émotionnelle par rapport au documentaire, mais a aussi le mérite de s’intéresser aux relations privées en Syrie.
Le dessin sepia tourmenté accompagne bien le propos en restant limité, très expressif pour les visages, il s’intéresse peu aux décors, à l’environnement.

Carthage (Joyce Carol OATES)

note: 3...Anonyme - 8 décembre 2015

Une ouverture de polar mais le fait divers n’est qu’un prétexte pour ausculter les Etats-Unis post 11 septembre. Roman à plusieurs voix pour sonder les hommes, les femmes, les différentes générations et classes sociales. Les révélations sur les hypocrisies sociales enfouies sous les valeurs famille, patrie, église, pourraient être semblables en Europe. Ce qui est plus frappant, c’est ce portrait d’un pays peuplé de jeunes, très jeunes vétérans passés du statut de patriotes admirés à celui de mutilés ignorés.
Certains passages sont difficiles voire éprouvants lorsque Oates sonde la question des prisons américaines et de la peine de mort. Ce qu’un Jonathan Franzen ou un Paul Auster font passer avec une certaine ironie, Joyce Carol Oates le sert cru, sans ménagement. Un roman glacial sur l’autre Amérique.

Jugan (Jérôme LEROY)

note: 3... Laëtitia - 1 décembre 2015

«En 1982, Les Forges avaient fermé, les HLM étaient restées et beaucoup d’ouvriers devenus chômeurs aussi. On aurait dit que cette partie de Noirbourg avait subi un nouveau bombardement. Celui-là était dû davantage à la mondialisation balbutiante qu’aux bombes au phosphore américaines mais il n’avait pas fait moins de dégâts. Des friches immenses, des ruines de briques rouges et au milieu de tout cela, les Gitans». C’est dans ce contexte qu’un fils de notable, Jugan, forme Action Rouge (inspirée d’Action Directe), groupe d’extrême-gauche prônant la lutte armée. Le narrateur, en vacances à Paros, revit en songe sa rencontre avec l’ancien détenu revenu dans sa ville natale, et la tragédie qui s’ensuivit. La non-linéarité du récit, ponctué de va-et-vient temporels (le rêve –contemporain- de Paros, les actions de Jugan jeune, l’histoire de Jugan et d’Assia) favorisent un crescendo dans la tension psychologique. Déjà dans «Le Bloc» (2011), Jérôme Leroy traitait de manière inédite et saisissante la montée de l’extrême-droite ces trente dernières années, avec la figure charismatique d’Agnès Dorgelles, présidente du Bloc aux portes du pouvoir. Avec «Jugan», il aborde cette fois-ci les mouvances d’extrême-gauche et le passage de l’idéologie à la lutte armée dans une ville ravagée par la désindustrialisation. Cet auteur humaniste, communiste convaincu mais sans complaisance non plus pour les actions terroristes, au fil des romans creuse un sillon cohérent, abordant les thèmes qui lui sont chers : la mondialisation, la désindustrialisation, l’intégration des populations issues de l’immigration, l’engagement politique comme un sacerdoce pour changer une société de plus en plus déshumanisée. Une œuvre à découvrir dans son ensemble ou isolée, en prise avec la société et passionnante.

La quête d'Ewilan (BD) n° 3
La passe de la goule (LYLIAN)

note: 3...Anonyme - 29 novembre 2015

La Quête d’Ewilan : un roman majeur de la littérature fantastique adolescente.

L’adapter en BD était un pari risqué, tant la magie du roman repose sur cette façon splendide qu’avait Pierre Bottero d’entrelacer les mots de façon à tisser un univers majestueux basé sur des valeurs fortes (courage, honneur, amitié), des personnages vibrants et charismatiques et des paysages somptueux.

Pourtant, la BD réussit à rester fidèle au roman, ou tout du moins, autant que faire se peut lorsque les images remplacent les mots. L’Imagination (avec un grand « I ») étant au cœur de la Quête d’Ewilan, il était évident que la BD ne pourrait jamais fidèlement retranscrire ce que chaque lecteur et lectrice s’imaginait en tournant les pages du roman.
Néanmoins, le découpage dynamique, le dessin net, le trait précis et les couleurs vives permettent de retrouver en grande partie l’énergie et la fraîcheur du roman.

Certes, la priorité est donnée à l’action, et ce au détriment de la psychologie des personnages et de leur relation au sein du groupe, et les paysages que l’on s’imaginait grandioses et à couper le souffle perdent un peu de leur splendeur lorsqu’ils sont confinés aux cases de la BD. Mais on a cependant droit à de belles scènes, certaines réellement fidèles aux livres (la rencontre avec les Faëls dans les Dentelles Vives) ou d’autres joliment amenées (la vision de l’Arche sur une très belle double page).

En résumé, une belle BD, au scénario et aux dessins particulièrement bien travaillés, qui amènera son lot d’émotions pour ceux qui ont déjà lu les romans (joie, frustration, étonnement, anticipation, rires, etc…) et également pour ceux qui ne les ont pas lus (joie, étonnement, incompréhension, admiration, rires, etc…).

On attend donc la suite avec impatience, ainsi que l’adaptation d’Ellana qui devrait paraître courant 2016.

Ex Machina (Alex GARLAND)

note: 3...Anonyme - 24 novembre 2015

Toujours et plus que jamais cette crainte viscérale du robot qui s’émancipe de son créateur et prend le pouvoir.
Depuis plusieurs décennies, de nombreux auteurs de SF et réalisateurs de cinéma, ont exploré les possibilités d’un tel scénario, d’Asimov à Cameron en passant par Kubrick. Et aujourd’hui, il semblerait que nous y sommes. Peut-on encore parler de science-fiction lorsqu’il s’agit d’intelligence artificielle ? Cet été à Buenos Aires se tenait une conférence internationale sur l’IA, alternant promotion des bénéfices que pourrait en tirer la société, et alerte sur la dangerosité de ces machines « pensantes », notamment en tant que potentielles redoutables armes de guerre.
Les médias relaient régulièrement les questionnements induits par cette révolution.
En septembre, un article du monde de Morgane Tual interrogeait : Une machine est-elle capable de philosopher ?
L’homme est autant excité qu’angoissé par ses propres travaux. Prométhée n’at-il-pas fait quelque chose de grand ? Mais ne l’a-t-il pas cher payé ?
Ce film à l’esthétique glacée vous met mal à l’aise, déplace l’empathie et la pitié d’un personnage à l’autre (le troublant robot gynoïde, le savant névrosé et le candide), joue sur vos nerfs dans un décor minimaliste et figé, bref il remplit parfaitement ses missions de thriller psychologique conjugué au futur proche.

Titus n'aimait pas Bérénice (Nathalie AZOULAI)

note: 3Prix Médicis 2015 Laëtitia - 21 novembre 2015

Comment surmonter un chagrin d’amour, surtout quand on est intimement persuadée que votre amant s’est «sacrifié» par «devoir familial», vous quitte alors que le sentiment amoureux est toujours là ? La narratrice, une Bérénice contemporaine, à la lecture d’un vers de Racine, pressent qu’elle doit se plonger dans l’œuvre du grand dramaturge pour mieux comprendre les instincts qui gouvernent les hommes et se guérir des passions mortifères. «Elle trouve toujours un vers qui épouse le contour de ses humeurs, la colère, la déréliction, la catatonie…Racine, c’est le supermarché du chagrin d’amour » se dit-elle à elle-même et à ses amis. L’histoire du chagrin d’amour est très vite éclipsé au profit de la vie romancée de Racine, faite de contrastes et de tiraillements permanents. D’abord, entre son éducation janséniste et le monde du théâtre qui l’ouvre à une vie futile, où les actrices se donnent à lui plus dans l’espoir d’obtenir le premier rôle que par véritable amour. Ensuite, entre son allégeance à Louis XIV, peu compatible avec celle de Dieu, entre le dénuement de la vie monastique qu’il a connu dans sa prime jeunesse et la pompe de la Monarchie qui l’aimante. Collectionnant les amantes, côtoyant La Fontaine,Corneille, Molière et ami de Boileau, historiographe du Roi Soleil, on redécouvre un Racine furieusement moderne et vivant, loin du personnage austère que certains ont dépeint. Pas étonnant que le Prix Médicis 2015 lui revienne !

Eutopia (Jean-Marie DEFOSSEZ)

note: 3... Laëtitia - 10 novembre 2015

Eutopia est une cité radieuse, protégée par un dôme de verre du monde extérieur, abritant exactement 1300 hommes et femmes qui, dès qu’ils atteignent un âge respectable, sont clonés et transférés dans un corps jeune et beau. Orian et Tiris font partie de cette élite qui ne manque de rien, si ce n’est de libre-arbitre et de liberté, puisque leur vie est régie par le CSS, conseil de sages qui décide de tout, jusqu’à la formation des couples. Mais quand des rebelles, les hommesGM, font irruption à Eutopia, ils sont contraints de les suivre dans leur monde. Là, ils découvrent un univers fait de pollution, de travail acharné, puisque les hommesGM sont quasi les esclaves des eutopiens, chargés de cultiver le blé fournissant l’énergie de la cité. Leurs certitudes vacillent, Orian se révélant sous son vrai jour, celui d’un chef fomentant la révolte à venir, désireux de rétablir l’égalité et la répartition des richesses entre Eutopia et l’extérieur. De facture classique, ce roman d’anticipation reste très agréable et prenant, et on suit avec plaisir les aventures d’Orian et son éveil à l’amour pour une femmeGM, Wouane. Autre point positif, le message de sensibilisation de l’auteur qui, docteur en zoologie et militant de la cause environnementale, alerte le jeune public sur les dangers de la surconsommation, de la crise des subprimes et du gaspillage des ressources naturelles. Un bon choix pour le prix AlTerre ado 2015-2016.

Au revoir là-haut (Christian De METTER)

note: 3...Anonyme - 7 novembre 2015

Ce qui semble à première vue une bonne opération marketing pour un éditeur - surfer sur le succès d’un roman vendu à près de 500000 exemplaires l’année de sa sortie et couronné d’un Goncourt – se révèle une très belle oeuvre. La prouesse : avoir transformé un livre de près de 600 pages en une BD où le texte est peu présent ! Les ingrédients de cette réussite ? Un gros travail d’adaptation sur son propre texte pour Pierre Lemaitre, relayé par le dessin éloquent de De Metter. Il est même troublant de pouvoir parler de très beaux dessins pour évoquer des planches mettant en scène une gueule cassée de la 1ère guerre sur fond d’arnaque aux monuments aux morts… Et pourtant, c’est un bel objet littéraire et esthétique

Silver n° 1
Silver : Livre premier (Kerstin GIER)

note: 4Par l'auteur de Rouge RubisAnonyme - 30 octobre 2015

Kristin GIER s’est imposée dans la littérature adolescente avec sa fameuse trilogie des Gemmes (Rouge Rubis, Bleu Saphir, Vert Emeraude), récemment adaptée au cinéma.
Sa nouvelle série, Silver, est-elle à la hauteur des nombreuses attentes de ses lecteurs et lectrices ?

La réponse est oui !
Tout d’abord, l’histoire est originale : on ne voyage plus dans le temps, mais à travers les rêves. Le personnage principal, Liv, adolescente au caractère bien trempé et à la répartie facile, n’est pas sans rappeler une certaine Gwendolyn de Rouge Rubis, mais on s’y attache tout autant. Mystère et humour sont bien au rendez-vous et le roman se lit presque d’une traite, tant les pages se tournent facilement. Seul bémol : trop de questions restent sans réponse à la fin du premier tome. Mais laissons à Kristin GIER le bénéfice du doute : peut-être réussira-t-elle à éclairer notre lanterne d’ici la fin des tomes suivants et dans la foulée, à approfondir l’histoire et la personnalité de certains personnages (on en sait bien trop peu sur Henri ! Quant à l’identité de Secrecy, le mystère reste entier ! ).

Silver, un roman fantastique, mêlant romance, suspens et humour à lire sans aucun remords par une belle soirée d’été, d’automne, d’hiver ou de printemps.

Villa des femmes (Charif MAJDALANI)

note: 3...Anonyme - 23 octobre 2015

Ce n’est pas le roman le plus inspiré de l’auteur, néanmoins son pouvoir narratif agissant toujours comme un sortilège, il se lit jusqu’au bout comme on boit un sirop.
Ce livre est à inclure dans l’œuvre « globale » de Majdalani. Comme une mosaïque prend forme au fil des tesselles ajoutées, ses histoires n’en forment qu’une, multipliant les angles de vue sans jamais bégayer. Le thème de l’œuvre reste la grande maison Moyen-Orient aux effluves d’orangers. Opulente, ploutocratique et chaleureuse dans tous ses paradoxes. Quant au motif dépeint cette fois, c’est le gynécée de la demeure, quand la guerre frappe à la porte... Sélection Prix Femina 2015.

Le Printemps des barbares (Jonas LUSCHER)

note: 3Politique fiction Laëtitia - 21 octobre 2015

«Il y avait là cet homme assis devant moi dans la poussière, qui pleurait la perte de ses dromadaires, de son existence, de quinze mille francs suisses. Quinze mille francs suisses, c’est ce que me rapporte mon entreprise. Par jour. […] Et cet homme était ruiné pour une telle somme. Qu’est-ce qui m’empêchait de descendre de la voiture, d’aller vers lui et de lui donner cet argent pour qu’il puisse s’acheter de nouveaux dromadaires ?». Telle est la question que se pose Preising, héritier d’un empire industriel suisse, qui assiste à ce carambolage qui le fait s’interroger sur l’absurdité et le cynisme de la marche du monde. Bien sûr, par peur de passer pour l’Occidental compatissant, il renoncera à aider l’homme et poursuivra sa route jusqu’à son hôtel luxueux au cœur du désert tunisien. Là, il va côtoyer une horde de traders londoniens célébrant un mariage, mais dès le lendemain la Grande-Bretagne est ruinée par une crise bancaire sans précédent, et quand tous les verrous sautent, ces derniers vont se muer en une horde barbare. Ce roman d’un jeune écrivain suisse alémanique sur le capitalisme débridé et ses conséquences, s’appuyant sur le grotesque et la distinction des classes sociales, est une satire jouissive mais néanmoins inquiétante du déclin de l’Occident.

Les Loups à leur porte (Jérémy FEL)

note: 4Rentrée littéraire 2015 Laëtitia - 29 septembre 2015

C’est un recueil de 12 nouvelles, pépite qui se dégage du limon parfois insipide de la rentrée littéraire, 12 histoires apparemment indépendantes les unes des autres, mais en fait machiavéliquement liées. Qu’ont en commun Daryl, adolescent pyromane du Kansas, Claire, étudiante française dont le mémoire porte sur un serial-killer, Damien, adolescent qui, suite à un événement traumatisant en colonie de vacances, va se révéler à lui-même dans toute sa noirceur, Mary Beth, qui voit resurgir les démons du passé ? Ce lien ténu qui unit tous ces personnages et bien d’autres encore, c’est le mal à l’état pur. Citant Joyce Carol Oates, Jérémy Fel nous livre ce qui a été «un des moteurs de (son) écriture, c’est de confronter la part civilisée de l’homme à sa part de sauvagerie». Car «les loups à leur porte», ce sont ces prédateurs aux multiples visages qui s’insinuent dans le quotidien pour le dérégler : pédophile, mère maltraitante, ancien amant, mais ce peut-être aussi l’agneau qui se transforme en loup pour reprendre sa vie en main et ne plus subir. Se réappropriant le genre populaire du roman d’épouvante mais en l’ancrant dans le réel, il manie l’art du suspense psychologique en faisant se resserrer les intrigues, pour mieux nous guider (ou nous perdre ?) dans ce puzzle fictionnel. Jérémy Fel, une nouvelle plume française très prometteuse !

Le Paradis perdu de John Milton (Pablo AULADELL)

note: 4« Mieux vaut régner en enfer que servir au paradis » Anonyme - 19 septembre 2015

Long poème épique, « Le paradis perdu » de John Milton retrace l’ouverture de la Genèse. Le récit se concentre sur le personnage de Lucifer, l'insoumis, l’ange déchu et son armée d’anges rebelles assoiffés de vengeance envers dieu. Par la guerre ? Non, son lieutenant Belzébuth à un tout autre dessein : corrompre les nouvelles créatures de dieu peuplant l’eden, Adam et Eve.
Ambitieux projet que de s’attaquer à ce colosse du 17ème siècle en 12 parties ! Le dessinateur espagnol parvient pourtant à offrir un document aérien, léger comme un vol de séraphin.
Un texte nécessairement drastiquement épuré, accompagné d’un dessin charbonneux tourmenté, percé par endroits de lavis vaporeux.
L’iconographie évoque la Renaissance dans la manière et les architectures et certains personnages font écho aux arlequins ou aux portraits de Paul du jeune Picasso.
Un ensemble texte-image puissant.

Sumô (Sharon MAYMON)

note: 3... Laëtitia - 19 septembre 2015

Un film israélien qui ne traite pas de querelles entre Palestiniens et Israéliens, de guerre et de terrorisme, voilà qui est rafraîchissant. Si en plus il traite d’un sujet décalé, l’art du sumo, c’est encore plus savoureux. Car si ce long-métrage évoque la dictature des apparences, en particulier l’obésité, il n’est ni moqueur, ni misérabiliste. Herzl et ses amis se réunissent dans un groupe «weight watchers» où ils subissent la tyrannie de la cheftaine. Suite à une humiliation de trop, Herzl l’envoie balader, quitte le groupe avec fracas, suivi de ses amis inséparables dont il devient le leader, trouve un job de plongeur dans un restaurant japonais. C’est là qu’il découvre l’art du sumo. Aidé du patron du restaurant, ancien entraîneur de sumotoris, tous se préparent avec sérieux en vue d’un championnat, mais c’est bien Herzl qui manifeste le plus d’ardeur, car il a bien conscience, comme le dit un proverbe japonais, que «Le chemin qui conduit au sommet a pour nom persévérance». On sera particulièrement sensible aux scènes de préparation et aux combats, qui permettent de découvrir une esthétique inconnue de l’Occident, et qui montrent le respect, l’adoration qu’un peuple porte au rikishi, littéralement «personne instruite dans le domaine de la force». On appréciera aussi les histoires autour de l’histoire, le fait que l’art du sumo les révélera à eux-mêmes, permettant à l’un de faire son coming-out, ou à l’autre de se découvrir une passion pour le métier de cameraman. Un feel-good movie à découvrir.