Critique

 

Le Castor (Mohammed HASAN)

note: 3Une cigale parmi les castorsAnonyme - 17 juin 2015

La littérature d’Arabie saoudite étant inversement proportionnelle à ses pétrodollars, lire un roman saoudien constitue forcément une découverte ! Et quel plaisir de commencer le voyage par cet auteur. Ghâleb, exilé volontaire à Portland, tue son ennui au bord du fleuve Willamette jusqu’à sa rencontre avec un castor. L’étude zoologique du rongeur va provoquer une onde de réminiscences de sa vie à Ryad. Outre les étonnantes ressemblances physiques avec ses sœurs, le castor présente des similitudes comportementales avec sa famille. Ce quadrupède ingénieur bâtit inlassablement des barrages, des remparts où l’on se protège autant que l’on s’isole… Etude de mœurs grinçante d’une société brutalement enrichie par le pétrole et l’immobilier dans la capitale après avoir abandonné la vie semi-nomade des bédouins du sud.
Le castor c’est aussi un roman d’introspection pour un quadragénaire démuni face au bilan de son existence toujours en décalage, sans mariage, sans enfant, sans entreprise personnelle… Une histoire d’amour insolente qui ne tient pas ses promesses. Ghâda, la femme adultère avec laquelle il poursuit une liaison irrégulière mais durable depuis 20 ans, fonctionne comme la proposition opposée sur la route des possibles en partant du même point. Une vie de cigale dans une société de castors… Une écriture riche en images sur le ton de la dérision porte ce livre dans la catégorie à ne pas manquer.