Critique

 

La Parole contraire (Erri DE LUCA)

note: 4...Anonyme - 22 janvier 2015

Voilà un tout petit livre tombé à point nommé dans le débat sur la liberté d’expression. Néanmoins rien d’opportuniste, il s'agit d'un réponse à son inculpation pour incitation au sabotage du projet de construction de la ligne TGV Lyon-Turin par une société française. Militant opposé au chantier dans la vallée de la Suze, il comparaîtra en janvier 2015 devant le tribunal de Turin ayant déclaré dans un journal «la LGF doit être sabotée». De Luca réfute l’accusation d’incitation à la dégradation rappelant que "saboter a une large application dans le sens figuré coïncidant avec le sens d'entraver". En dehors de l’engagement politique propre à l’auteur,le texte évoque l'influence des lectures, la figure de l'écrivain comme voix publique. Il soulève avec habileté le déséquilibre du rapport de force, même dans le droit d’expression: Si l’on considère que la parole de l’écrivain fait autorité et qu'elle est incitative à passer l’acte,pourquoi les chefs de partis peuvent-ils menacer d’évasion fiscale sans être poursuivis pour délit d'incitation ? Ne sont-ils pas investis d'une autorité intellectuelle eux aussi ? "L' écrivain possède une petite voix publique.Il a donc le devoir de protéger le droit de tous à exprimer leur propre voix. Parmi eux, je place au premier rang les muets, les sans voix, les détenus, les diffamés, les analphabètes et les nouveaux résidents qui connaissent peu ou mal la langue."