Critique

 

La Fabrique du monde (Sophie VAN DER LINDEN)

note: 3... Laëtitia - 4 février 2014

«Comme chaque fois, je ne peux m’empêcher d’imaginer l’étranger qui portera la pièce que je suis en train de commencer. Cette chemise-là sera portée par un homme qui aime les jeans et qui fait de la moto. […] Si ça continue, je vais faire comme Yuan qui, un jour, a glissé en douce un mot dans la poche d’un pantalon pour hommes, en pensant que le Prince charmant qui le porterait trouverait le message et hop, sauterait dans le premier avion pour venir la sauver? Est-ce qu’il leur arrive de penser à nous?». Cette réflexion de Mei, héroïne principale du roman, pose le décor. Nous sommes dans une immense usine de textile, quelque part en Chine, et c’est le quotidien de ces petites mains qui nous est conté, avec ses cadences infernales (à tel point qu’une d’entre elles aura un tendon sectionné), son contremaître qui les harcèle pour un meilleur rendement. Malgré tout, elles rêvent comme leurs consoeurs occidentales : d’une belle robe, de l’amour. A la faveur du Nouvel An chinois qui la laisse seule à l’usine avec Cheng, le nouveau contremaître, Mei va s’éveiller à l’amour. Avant de déchanter. Très beau premier roman, qui nous poursuit longtemps après et nous interroge : sommes-nous prêt à accepter cela pour céder à la mode à bas coût?